NEUM 1997

SÉMINAIRE DE PRIÈRE ET DE FORMATION

Pour les responsables des centres de paix, des groupes de prière et pour les organisateurs de pèlerinages

24 - 28 février 1997

PROGRAMME

1. La pastorale familiale (Dr Paul M. Zulehner)
2. Marie et la famille (Dr fr. Ljudevit Rupčić)
3. La famille dans le monde contemporain (Dr méd. fr. Joško Srdanović)
4. La famille dans les messages de la Reine de la Paix (Dr fr. Slavko Barbarić)
5. Activités du Centre d’Informations « Mir » Medjugorje » (Mr fr. Miljenko Stojić)
6. La place de Medjugorje dans l’Église (Dr René Laurentin)


PRÉSENTATION DES CONFÉRENCIERS

Dr Paul M. Zulehner, né en 1939, est docteur en philosophie et en théologie. Il est recteur de la section de Théologie pastorale à l’Université de l’état de Vienne.

Dr. fr. Ljudevit Rupčić, ofm est né en 1920 à Hardomilje, Ljubuški. En 1939, il entre dans l’ordre franciscain dans la Province d’Herzégovine et est ordonné prêtre en 1946. Il termine ses études de théologie à la Faculté de théologie de Zagreb en 1947 où il obtient le doctorat en 1958 et l’habilitation à l’enseignement supérieur en 1971. De 1958 à 1988, il enseigne l’exégèse du Nouveau Testament à la Théologie franciscaine à Sarajevo et à la Faculté de théologie de Zagreb. Sous le régime communiste yougoslave, il est emprisonné en 1945 et en 1947, puis de 1952 à 1956. De 1968 à 1981, il est membre de la Commission théologique auprès de la Conférence épiscopale d’ex-Yougoslavie. Il traduit le Nouveau Testament en croate depuis l’original, traduction qui a connu de nombreuses éditions. Il publie de nombreux livres, études et articles en croate, en allemand, en italien, en français et en anglais. Il intervient aux nombreux congrès et symposiums en Europe et en Amérique.

Dr. méd. fr. Joško Srdanović est né en 1954 à Kučići près d’Omiš, où il a terminé l’école élémentaire. Après le Bac au lycée à Split, il a étudié la médecine à la faculté de Zagreb, où il a obtenu le diplôme en 1979. En Allemagne, il s’est spécialisé en psychiatrie. Pendant neuf ans, il a travaillé en tant que médecin. En 1989, il a quitté son poste de psychiatre à la Clinique psychiatrique pour les enfants et les jeunes à Zagreb, et est entré dans la province franciscaine de Saint Cyrille et Méthode, où il a fait ses études de théologie à la faculté de Zagreb. Il a été ordonné prêtre en 1994. Actuellement, il vit et travaille au couvent franciscain de Varaždin, en Croatie, notamment sur la prévention de la toxicomanie et comme thérapeute. Il accompagne les personnes manifestant des difficultés spirituelles, psychologiques et familiales. Il anime des groupes de jeunesse franciscaine, des groupes de prière et des séminaires d’évangélisation dans l’esprit du Renouveau.

Dr fr. Slavko Barbarić, ofm, est né en 1946 à Dragićina. Membre de la Province Franciscaine d’Herzégovine. Il étudie la Théologie à Visoko, à Sarajevo et à Schwaz (Autriche), et est ordonné prêtre en 1971. En 1982, il obtient son doctorat en pédagogie religieuse. Depuis, il vit à Medjugorje, où il écrit de nombreux livres et articles de spiritualité. Il travaille au Sanctuaire, anime de nombreuses retraites, conférences et rencontres sur les événements de Medjugorje dans de nombreux pays du monde.

Mr. fr. Miljenko Stojić, ofm, né en 1960 à Dragićina. Il étudie la théologie à Zagreb, à Jérusalem et à Sarajevo, puis est ordonné prêtre à Mostar en 1987. A l’Université pontificale « Antonianum » à Rome, il obtient, en 1991, une licence en spiritualité chrétienne et franciscaine. En tant que prêtre, il a servi dans diverses paroisses et, un certain temps, comme maître des scolastiques. Pendant la guerre, il a été aumônier militaire. Il anime des retraites spirituelles. Il est écrivain, membre de l’Association des écrivains croates. Il vit et travaille à Medjugorje, où il est actuellement vicaire paroissial et directeur du Centre d’Information « Mir ».

DÉCLARATION

Les animateurs des groupes de prière et des Centres de paix et les organisateurs de pèlerinages, en tout 130 personnes de 21 pays, se sont rassemblés à Neum du 24 au 28 février 1997, pour la IVème Rencontre internationale de prière, ayant pour thème la spiritualité de la famille. Grâce aux conférences, aux échanges, aux prières et à la célébration commune de l’eucharistie, nous sommes encore plus convaincus que :

  • la famille est profondément inscrite dans le plan créateur de Dieu
  • en raison de l’Incarnation du Christ, la famille est particulièrement honorée au cœur de la Sainte Famille
  • dans le christianisme, la famille est sanctifiée par le sacrement du mariage.

Nous avons pris davantage conscience du fait que la famille se trouve aujourd’hui en crise, mais également qu’il y a une espérance pour la famille et pour le monde. Nous voulons rendre témoignage de cette espérance auprès de tous les hommes de bonne volonté. À tous ceux qui vénèrent la Reine de la Paix, nous recommandons de vivre selon ses messages :

  • en priant ensemble en famille
  • en lisant la Bible
  • en participant ensemble à la célébration de l’eucharistie.

Lorsque Dieu aura trouvé sa vraie place dans la famille, la famille, l’Église et le monde seront renouvelés. Ainsi, avec une espérance renouvelée, nous pourrons entrer joyeusement dans le nouveau millénaire.

Nous recommandons à tous ceux qui diffusent les messages de la Mère de Dieu dans le monde de rester au service de la vérité, et de ne pas répandre des idées qui ne seraient pas en accord avec ces messages. Dans ce sens, nous recommandons l’intensification de la communication mutuelle et l’établissement d’un lien étroit avec le « Centre d’Information "Mir" Medjugorje ».


CONFÉRENCES

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Dr Paul M. Zulehner

LA PASTORALE FAMILIALE

L’Église est consciente de la mission qui lui a été confiée par son Fondateur, à savoir de créer l’espace pour la vie et à repousser les diverses expressions de la mort. Il s’agit avant tout de la vie éternelle et du dépassement de la mort éternelle. Jésus a néanmoins voulu que le Royaume de Dieu se manifeste – même si ce n’est qu’à travers des signes - dès maintenant, dès ici-bas, et non seulement après la mort. Jésus disait qu’en Lui, le Royaume était déjà présent. Dès que les hommes entrent en communion avec Jésus, le Royaume de Dieu s’étend dans le monde et les espaces vitaux et guérisseurs s’ouvrent. Par conséquent, les chrétiens sont des hommes et des femmes qui ne désirent pas seulement aller au Ciel, mais par qui les traces du Ciel se manifestent dès ici-bas. La principale vocation de l’Église est de transformer la vie de telle manière que, dès ici-bas, au cœur de nos vies, nous percevons les traces du ciel. Chaque communauté ecclésiale est donc appelée à être un lieu où le Ciel pénètre la terre et devient présent. À partir de ces lieux, notre vie quotidienne se transforme en une vie qui ressemble à celle d’après la résurrection, car « nous savons, nous, que nous sommes passés de la mort à la vie. » (1Jn 3,14)

La vie en famille représente certainement un des domaines les plus importants de notre vie quotidienne. Partout en Europe, la famille est considérée comme l’espace vital le plus important.

Au cœur de la famille, nous pouvons faire l’expérience que chaque personne est précieuse et acceptée inconditionnellement. Nous pouvons y grandir, nous enraciner et faire l’expérience de la liberté et de la protection.

L’Église, qui favorise une vie saine et les traces du Ciel au cœur de la vie quotidienne, a toujours montré une grande attention à l’égard de la vie des personnes, surtout de ses propres membres, dans le cadre de la communauté familiale. Cette attention bienveillante à la vie est le cœur même de la pastorale familiale.

Aujourd’hui, je ne développerai que quelques points relatifs à une multitude d’aspects de la pastorale familiale contemporaine. Ils concernent l’histoire ordinaire du couple et de la famille : la fondation d’une famille, y compris la préparation au mariage ; la vie familiale ; la vie des familles chrétiennes dans le cadre des communautés ecclésiales, particulièrement des paroisses ; la dissolution de la famille, à savoir la mort, la séparation, le divorce.

I. VERS LA FONDATION D’UNE FAMILLE

1.1. L’aptitude au mariage

La famille est toujours composée de personnes concrètes. Plus les membres sont épanouis, plus ils continuent à s’épanouir, mieux la famille se porte. Une bonne préparation à la vie en famille n’est donc pas possible dans le cadre exclusif d’une brève préparation au mariage : elle demande beaucoup plus de temps, comme, par exemple, la vie au cœur d’une famille d’origine vivante ou la participation à une bonne pastorale des jeunes. La préparation à la vie en famille impose des tâches importantes :

a) Tout d’abord, l’éducation doit conduire une personne à devenir autonome et sûre d’elle-même. Cela implique qu’elle « quitte son père et sa mère » (Gn 2,24), tâche de toute une vie, aujourd’hui très difficile pour les jeunes. Ils ont souvent été privés du père à cause de son engagement professionnel, mais également à cause des guerres qui l’éloignent du foyer. Quitter sa mère devient de plus en plus difficile, surtout lorsque celle-ci a vécu pendant des années dans une unité symbiotique, presque impossible à rompre, avec un enfant unique. Pour devenir des adultes indépendants, les enfants ont besoin d’un père et d’une mère.

Une personnalité forte dispose d’une bonne base lui permettant de ne pas céder instantanément à toutes les sollicitations. La capacité de remettre à plus tard l’assouvissement des pulsions est un moment important dans la maturation en vue du mariage.

Un des aspects du développement de la personnalité est le développement de la masculinité et de la féminité. Aujourd’hui, beaucoup pensent que ce développement se fait plus facilement dans les communautés du même sexe que dans des groupes mixtes. Les spécialistes de la pédagogie des jeunes plaident tout autant pour les groupes dans lesquels on ne retrouve que des filles ou que des garçons, que pour les groupes mixtes.

Le développement de la personnalité inclut également l’intégration de la sexualité de la personne. Toute diabolisation angoissée de ce magnifique don que Dieu a fait à l’homme signifie en réalité le mépris du Créateur.

Là, où la personnalité a pu se développer, on constate plus facilement la capacité de vivre seul. Cela est surtout vrai pour les hommes. Qui ne peut vivre seul, n’est pas non plus capable de se marier. Toute sa vie, cette personne cherchera non pas une partenaire, mais une mère-poule.

b) La capacité à la solidarité et au partage se développe de pair avec la personnalité. La personne « généreuse » (selbstlos) est celle qui a su développer sa personnalité (Selbst) qu’elle peut alors rayonner, « donner » (los). L’amour de soi et l’amour du prochain sont interdépendants. La vie familiale est impossible si les membres ne peuvent compter sur une grande solidarité ; en effet, la famille est également un des lieux les plus importants d’apprentissage de la solidarité.

c) Une troisième condition importante pour que les personnes puissent former les communautés de vie est d’avoir une grande ouverture spirituelle. Il est important que les membres de la famille ne s’enferment pas dans un monde de plus en plus étroit, dans le sens du « cocooning » moderne. L’ouverture, dans le sens de l’espace, signifie qu’une personne ne perçoit pas seulement son petit monde à elle, mais soit consciente de l’environnement plus large. Dans le sens temporel, l’ouverture signifie que l’on ne recherche pas son bonheur uniquement dans la vie terrestre. Et pourtant, c’est précisément un des traits fondamentaux de notre culture : nous voulons un maximum de bonheur - sans souffrance - aussi vite que possible, nous voulons - comme le disent les jeunes – « tout et tout de suite ». Pour beaucoup, la vie devient ainsi la dernière chance (Marianne Gronemeyer). Une telle attitude fondamentale conduit à une course effrénée au bonheur qui produit immanquablement ses effets sur l’entourage.

d) Un développement religieux adulte, qui va de pair avec le développement de la personnalité, apporte également une juste compréhension de la dimension sacramentelle du mariage chrétien.

1.2. La préparation au mariage

Dans le souci de la formation chrétienne à la vie en famille et - à l’intérieur de la famille - à la vie conjugale, de nombreuses structures d’Église ont développé des programmes de préparation au mariage. On y trouve des modèles qui diffèrent par la méthode utilisée et par la durée : les séminaires pour les couples en groupes restreints, ces rencontres étant espacées dans le temps et leur durée atteignant rarement une année, ou bien les grands rassemblements de courte durée. L’objectif en est soit d’enseigner, soit de partager et d’apprendre à partir des expériences des autres. Les accompagnateurs sont souvent des couples ayant une grande expérience, des médecins et des aumôniers, agissant ensemble.

La pratique des exercices qui concernent la vie quotidienne (apprendre à communiquer, à gérer l’argent, les conflits, à éduquer les enfants) peut conduire à oublier le plus important. Sans s’en rendre vraiment compte, notre quête d’amour est en réalité la quête de l’éternité et de l’absolu, donc de Dieu lui-même. Nous projetons secrètement cette attente les uns sur les autres, mais personne ne peut la combler. Il serait donc déterminant pour la réussite de l’amour que l’on préserve autrui de nos exigences excessives, qui relèvent en réalité du religieux. Roman Bleistein exhorte les amoureux à la vertu de la miséricorde : je pardonne à autrui de ne pas pouvoir être mon Dieu.

Un tel travail théologique de libération est rarement fait dans le cadre des séminaires de préparation au mariage. Il ne contredit d’ailleurs en rien la certitude exprimée dans la liturgie du mariage, à savoir que Dieu a « réuni » les amoureux. Notre assurance de croyant nous dit que Dieu demeure « le Dieu fidèle qui ne trahit jamais » qui chemine avec les amoureux...(Dt 32,4). Mais cela ne nous dégage pas de l’obligation d’épargner la personne aimée de nos fausses exigences religieuses. L’amour ne grandit que dans un environnement miséricordieux, ce qui signifie la disposition à toujours pardonner.

1.3. Accompagnement dans le mariage

Dans certaines communautés, les jeunes couples se joignent aux groupes de couples déjà mariés, ou bien rejoignent les communautés chrétiennes de base. Cette démarche a fait ses preuves. Dans certaines paroisses, les couples mariés depuis longtemps invitent les jeunes couples au partage. Un tel accompagnement est un bon signal, visible au-delà des frontières de l’Église : s’il est vrai que la vie de couple nécessite un espace protégé dans lequel l’intimité puisse grandir, il n’en demeure pas moins qu’elle a également besoin d’être soutenue.

II. LA VIE FAMILIALE

Puisque l’Église tient aux familles, elle se doit d’accorder son attention aux conditions de la vie familiale contemporaine. Il n’est pas opportun de dénigrer en bloc la culture moderne, car la cellule familiale y prend part de diverses manières.

2.1 Les points forts de la culture familiale contemporaine

Un des points forts, c’est qu’une grande importance est attribuée aux espaces vitaux accordés à la famille. Plus de 90% d’Européens déclarent que la famille est leur espace vital prioritaire. Ce n’est pas surprenant, car ils y trouvent « des espaces empreints de stabilité et d’amour ».

La solidarité à l’intérieur de la famille est également un point fort. Il existe une sorte d’accord tacite entre les générations qui comporte divers aspects :

a) La solidarité entre les parents et les enfants. (Les parents partagent leur avenir avec leurs enfants ; si les hommes ne sont par prêts à cela, l’avortement est plus facilement envisagé.)

b) La solidarité de la famille avec les personnes âgées. (L’espace familial englobe plusieurs générations, souvent même des membres de la famille qui vivent seuls ; ces personnes font partie du réseau familial, sans nécessairement vivre sous le même toit ; aux moments critiques, ils peuvent compter sur la solidarité familiale.)

c) La solidarité des enfants avec leurs parents. (C’est une des données principales du contrat entre les générations, concernant principalement le désir des personnes de mourir à la maison. Le Cardinal Carlo Maria Martini, président du Conseil des Conférences épiscopales d’Europe, a déclaré en 1989 : « Tout comme les parents, qui permettent aux enfants de venir au monde, les enfants doivent désormais assister leurs parents à leur départ du monde ». Un tel objectif est sans doute idéaliste, et n’est réalisable qu’à long terme. Cependant, une telle évolution est de la plus haute importance à long terme, si l’on prend en compte le désir des personnes de mourir chez elles, mais également la possibilité de libérer ainsi les places dans les hôpitaux.)

Un des aspects positifs de la culture familiale contemporaine est ce que l’on pourrait appeler « l’écologie relationnelle ». La prise de conscience du fait que le système relationnel (partenariat, famille) est un système très sensible, conduit à éviter certaines erreurs qui menacent de plus en plus notre écosystème. Les couples savent que leurs « énergies » sont limitées. L’expérience douloureuse de la surcharge permet la prise de conscience que l’autre a des limites, et qu’une accumulation de petites charges peut conduire à un effondrement inattendu du système (à la séparation, au divorce). Une des pierres de fondation d’une telle « écologie des relations humaines » est également la sensibilité à la violence sous toutes ses formes : la violence dans le langage, dans la distribution des chances de la part des structures et, non la moindre, la violence des hommes à l’égard des filles et des femmes.

2.2. Les points faibles de la culture familiale contemporaine

La culture familiale contemporaine souffre également de certains désavantages. Qu’il nous suffise de mentionner les suivants :

La dés-institutionnalisation et la dé-standardisation en cours conduisent les sociétés contemporaines à priver les couples mariés de certains avantages sociaux. Les couples n’ont plus aucune garantie contre une menace extérieure visant leur relation. La fidélité n’est plus institutionnalisée, mais appartient au bon vouloir des personnes impliquées. Les normes contemporaines n’aident pas non plus, puisque au cours de leur application aux situations ambiguës, les personnes abandonnées à elles-mêmes ont beaucoup de mal à les mettre en pratique.

Un poids supplémentaire qui pèse sur la famille est la soumission du monde familial au monde économique. Cela correspond à la soumission de la vie aux biens (morts). Pour notre culture, la production des biens matériels est devenue plus importante que la reproduction de la vie. Cette échelle de valeurs s’exprime jusque dans la rémunération des métiers correspondants. Les métiers qui s’occupent de l’humain sont largement moins rémunérés que les métiers qui s’occupent de la production des biens matériels. Or, dans les métiers qui s’occupent de l’humain, on trouve surtout des femmes : dans les écoles élémentaires, les jardins d’enfants, les métiers de soins, auprès des malades, des personnes âgées, des mourants. La cellule familiale, qui est un lieu de vie, est actuellement sous-estimée dans la plupart des sociétés.

Le deuxième poids qui pèse sur la famille correspond à ce qui a déjà été mentionné : l’absence des pères, lourde de conséquences. Ils sont tellement impliqués dans leur vie professionnelle, hors du foyer, qu’ils peuvent - dans le meilleur des cas - pourvoir aux besoins matériels de la famille, mais sont à peine disponibles pour participer à la résolution des questions vitales de la vie de famille.

La famille est ainsi le plus souvent privée du père, ce qui représente un poids croissant pour les femmes. Celles-ci - de plus en plus formées –souhaitent être présentes, elles aussi, dans la vie professionnelle, tout en étant présentes dans le monde familial. Les enfants sont ainsi privés de l’indispensable confrontation avec leur père, ce qui prive également les hommes de l’occasion de développer leurs capacités familiales, en plus de leurs capacités professionnelles : prendre soin des enfants, apprécier les choses peu gratifiantes mais indispensables à la vie, s’occuper du faible. Est-il vrai qu’un homme sans enfant devient barbare, selon un éminent pédagogue allemand ? (Hartmut von Hentig)

2.3. La politique familiale

Si l’Église n’omet pas de prendre conscience de ces points faibles de la vie familiale, elle trouvera les moyens de réagir. Ceci l’oblige à l’éveil en ce qui concerne les questions de la politique sociale, et même à s’impliquer politiquement en faveur de la famille. La pastorale individuelle ou familiale ne suffit pas, il faut une politique familiale. Pour cela, l’Église a besoin des meilleurs experts, mais également de la capacité à participer à la vie politique, sans pour autant s’attacher à un parti politique. Les communautés paroissiales peuvent devenir des lieux éminemment politiques : cet engagement est une expression de leur fonction diaconale, là où elles se trouvent.

Ce lobbying en faveur des familles aura d’autant plus de succès si l’Église, tout en restant politiquement indépendante, articule sa position quant à la politique familiale et invite les hommes politiques responsables à s’asseoir autour d’une « table ronde ».

2.4. La pastorale familiale

La pastorale familiale au sens étroit du mot est un autre aspect de la sollicitude pastorale tournée vers la vie familiale. Pour cela, de nombreux modèles, ayant déjà fait leurs preuves, existent :

La création de réseaux familiaux constitués d’unités familiales au sein des groupes familiaux ou des communautés de base peut être une grande aide. Une attention toute particulière est accordée aux groupes de « Marriage encounter » au sein desquels de nombreuses familles reçoivent un soutien considérable.

Il ne faut pas perdre de vue le fait que de nombreuses paroisses soutiennent les organismes d’état par leur engagement compétent dans l’éducation ou le soin des enfants. (Par exemple : les jardins d’enfants paroissiaux, mais également l’engagement et le travail auprès des enfants et des adolescents, mis en place par l’Église)...

Les efforts visant à créer des « églises à domicile » sont également positifs. Là, l’Église ne se retrouve pas seulement dans ses locaux officiels, mais aussi dans les maisons privées. Cette tradition de l’Église primitive gagne en signification dans les cultures post-chrétiennes. L’accent est mis sur la prière et la lecture biblique en famille. On célèbre la messe ensemble. Les familles s’entraident et forment ainsi un réseau de solidarité familiale.

La pastorale familiale inclut également la célébration de l’eucharistie au sein des familles, où l’on peut prendre en compte la présence de petits enfants et de nourrissons, ce qui influence la manière de célébrer : il faut laisser libre cours à l’imagination. Il est possible de célébrer parallèlement deux liturgies de la parole, une pour les adultes et une pour les enfants. Au moment de l’offertoire, les deux groupes peuvent se rejoindre et célébrer l’eucharistie ensemble.

Dans l’avenir, il serait judicieux de travailler au développement de la culture chrétienne familiale. Les questions qui se posent sont : Comment vivre les dimanches ? Où en sommes-nous dans la vie de prière de la famille ? Comment les richesses traditionnelles liées aux sacramentaux peuvent-elles réintégrer les foyers : la bénédiction annuelle de la maison, les traditions liées au temps de l’Avent, la crèche de Noël, les traditions liées au temps pascal ? Comment les familles pourraient-elles de nouveau et avec compétence prendre soin de leurs malades et de leurs mourants ? Dans les pays germanophones, nous connaissons les « manuels pour les familles » (Neysters, Schmitt…) qui traitent les questions de la vie familiale au quotidien, la mort et la préparation à la mort. Ils ont connu une diffusion aussi large que surprenante. On constate une demande importante d’expériences intéressantes.

III. LA FAMILLE EN CRISE

La Bible nous dit que Dieu voit et entend la souffrance et les besoins des hommes. « J’ai vu la misère de mon peuple... J’ai entendu son cri… », tels sont les mots que nous pouvons lire dans l’histoire de la fondation d’Israël. (Ex 3,7) Jésus poursuit résolument ce chemin de Dieu en direction des pauvres et des souffrants. « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin de médecin, mais les malades », (Mt 9,12) ceux qui souffrent dans leur corps et dans leur âme. Aussi, l’Église a-t-elle été appelée à se tenir au côté des familles, surtout des familles en détresse, en situation d’échec professionnel, de ceux qui ne peuvent pas élever la famille ou prendre soin d’elle.

3.1. Conseiller les familles

Afin de remplir cette mission, en collaboration avec d’excellents experts en matière de travail social et de psychologie, l’Église a créé d’excellents services de conseil : conseil matrimonial et familial pour les familles en crise, conseil en matière d’éducation pour les parents qui ne sont pas en mesure de faire face à ces exigences, conseil offert aux hommes et aux femmes confrontés aux grossesses non désirées. Un service, actuellement en développement, est celui de médiation dans les situations de séparation ou de divorce. À partir de leur spiritualité, les Églises peuvent - plus facilement que les structures d’État - développer de nouvelles alternatives.

3.2. La diaconie familiale

Ces services de conseil sont une expression de l’amour de l’Église pour les familles : c’est la diaconie auprès des familles. Il y a d’autres tâches. Il est bien connu que les familles nombreuses, et davantage encore les familles monoparentales, sont surchargées du point de vue de l’éducation, mais aussi matériellement. La communauté ecclésiale en est solidaire et cherche avec elles les moyens d’alléger leurs fardeaux.

3.3. Les séparations

Lorsqu’une communauté familiale se déchire, la situation devient critique pour toutes les personnes concernées : les adultes, les enfants, mais aussi les personnes âgées. Le décès de l’un des membres de la famille bouleverse déjà beaucoup la vie d’une famille, mais l’effet d’un divorce ou d’une séparation n’est pas moindre. La séparation est parfois un moindre mal en comparaison avec ce qui peut arriver lorsque les conjoints persévèrent et persistent à vivre ensemble. C’est pourquoi, le Droit Canon de l’Église reconnaît « la séparation de corps et de biens ».

Après une séparation, comment est-il possible pour les personnes concernées de vivre à nouveau dans la paix, dans laquelle, selon St Paul, Dieu nous a appelés à vivre ? (1Co 7,15c)

a) Une séparation permet parfois à une relation de revivre. Il peut y avoir une « résurrection » à partir d’une relation qui était morte.

b) D’autres apprennent à vivre seuls. Ils constatent alors combien il est difficile de nos jours de vivre seul avec des enfants, et que seul le soutien de l’entourage permet d’éviter l’appauvrissement et de supporter la surcharge. C’est pourquoi, dans de nombreux lieux, l’Église aide les personnes qui élèvent seules leurs enfants à créer des groupes de soutien mutuel. La vitalité des communautés chrétiennes se manifeste à travers leur capacité à intégrer les personnes divorcées dans leur vie quotidienne. Le Pape Jean-Paul II en personne demande aux communautés et à leurs bergers d’offrir une aide dans ce sens. (FC 80-83)

Les communautés chrétiennes pourraient considérer cet apprentissage à vivre seul comme une période passagère de maturation des personnes. Il n’est pas rare qu’après une séparation un couple se retrouve dans une nouvelle profondeur. Le processus de résurrection d’une relation morte peut effectivement avoir lieu.

3.4. Divorcé et remarié

c) L’Église est confrontée à un défi majeur : la présence d’un nombre croissant de membres qui, après avoir divorcé, ont contracté un mariage civil, sans avoir auparavant obtenu l’annulation de leur premier mariage.

Il ne faut pas perdre de vue le fait que le nombre de mariages considérés comme non valides ou non existants est beaucoup plus élevé que celui des mariages divorcés par l’Église. Il n’est pas rare que les témoins requis pour cette procédure manquent. « In foro interno », selon la pratique de l’Église, peut offrir une solution au cas par cas.

La question du divorce et du remariage est malheureusement généralement abordée uniquement sous l’angle de la question de savoir si ces membres de l’Église peuvent approcher les sacrements. Aussi importante qu’elle soit, cette question occulte souvent une autre question, tout aussi importante, qui est de savoir comment - dans notre société concrète - une personne, après le divorce, peut survivre, menant une vie digne de l’homme. Dans les sociétés qui offrent aux personnes seules (avant le mariage, veufs, séparés) un réseau porteur, cette question n’est pas aussi angoissante que dans nos sociétés ultramodernes, individualisées, déconnectées. Pour vivre et survivre humainement dans nos sociétés froides et anonymes, nous avons plus que jamais besoin « d’un toit au-dessus de l’âme ». Ceci peut bien évidemment être offert par une communauté de croyants, à laquelle une personne peut rester liée même après un divorce. Le commandement de Jésus de ne pas se remarier après un divorce est beaucoup plus vivable lorsque de telles communautés existent. (Gerhard Lohfink, Rudolph Pesch) Or, ces réseaux communautaires trans-familiaux, ne sont-ils pas aujourd’hui une exception plutôt qu’une règle ? Est-ce que nous ne demandons pas trop lorsque - au nom de l’Église et, bien sûr, à la lumière de l’Évangile - nous exigeons des personnes à vivre seules après un divorce, sans leur offrir une communauté familiale qui rend possible une vie solitaire après le divorce ?

IV. LA RELATIVISATION DE LA FAMILLE

Permettez-moi de terminer par une réflexion théologique sur la famille, sur la relativisation du mariage et de la famille selon la Bible.

D’une part, la Bible contient de magnifiques textes sur l’amour entre l’homme et la femme. La communauté de vie familiale est considérée comme un don de Dieu accordé aux hommes, après que l’homme fut chassé du Paradis.

D’autre part, Jésus nous dit qu’au Ciel il n’y aura plus de mariage. Alors, il ne sera plus nécessaire de canaliser les forces souvent excessives de l’amour par le biais des liens matrimoniaux et familiaux. Tout le monde appartiendra à la famille de Dieu, à la famille des sauvés.

Les premières communautés chrétiennes avaient la ferme conviction, héritée de Jésus, que, dès à présent, il était possible de vivre certains aspects du paradis à venir. Les chrétiens se considéraient donc comme une communauté de vie, non fondée sur les liens naturels, mais sur leur appartenance commune à la grande famille de Dieu. La famille bourgeoise a donc été relativisée en fonction de cette famille de Dieu : « Celui qui est marié... ». (1Co 7,29-32) Nous retrouvons cette relativisation du mariage et de la famille bourgeoise lorsque la première communauté chrétienne entre en tension avec les nouvelles communautés familiales en son sein, en particulier avec les « mariages mixtes ». Dans de tels cas, St Paul prône la dissolution de la communauté bourgeoise au profit de la communauté spirituelle. (1Co 7,10.15)

Une des conséquences non négligeables de la prise de conscience de la valeur de la famille de Dieu est le célibat, représentant une des caractéristiques des communautés religieuses. Au fond, cette expression est faible et négative. Elle pourrait être remplacée par « vie communautaire trans-familiale », ou bien « vie communautaire comme après la résurrection ».

Cette relativisation de la valeur du mariage et de la famille ne signifie pas pour autant sa dépréciation, encore moins un mépris monastique de la sexualité humaine. Elle pourrait plutôt faire du bien à la vie conjugale et familiale. Car, les personnes qui choisissent de fonder une famille souffrent aujourd’hui d’une surcharge excessive. Cette relativisation pourrait les soulager et leur faciliter la vie dans la durée. Si, de plus, une famille bourgeoise est intégrée dans le réseau vital trans-familial d’une communauté ecclésiale, les cellules familiales souvent restreintes s’élargissent. Et enfin, mais non en dernier : si une personne, quelle qu’en soit la raison, après mûre réflexion et après avoir été bien conseillée, pense devoir quitter une famille bourgeoise, elle trouvera toujours une place dans une communauté trans-familiale ecclésiale. Cette personne ne serait alors pas confrontée aux questions de survie, comme tant de personnes veuves, séparés ou abandonnées. La meilleure contribution à la pastorale familiale est donc la création d’un réseau vital supra-familial d’une communauté chrétienne.

Bibliographie

I. Vers la fondation d’une famille

1.1. L’aptitude au mariage

  • Willi, Jürg, Was hält Paare zusammen? Der Prozeß des Zusammenlebens in psychoökologischer Sicht, Reinbeck 1991.
  • Schellenbaum, Peter, Das Nein in der Liebe, München 1986.
  • Goldbrunner, Hans, Masken der Partnerschaft. Wie Paare ihre Wirklichkeit konstruieren, Mainz 1994.
  • Krems, G., Mumm, R., Theologie der Ehe, Regensburg-Göttingen 1969.
  • Bauman, Urs, Die Ehe - ein Sakrament?, Zürich 1988.
  • Hilberath, Bernd Jochen, Die Ehe als Sakrament - Die Perspektive der katholischen Theologie, in: Böckle u.a. (Hg.) Die konfessionsverschiedene Ehe. Problem für Millionen - Herausforderung für die Ökumene, Regensburg 1988, 27-47.
  • Hilberath, Bernd Jochen, Sakramentalität und Unauflöslichkeit der Ehe aus dogmatischer Sicht, in Theologische Quartalsschrift 175 (1995), 125- 135.
  • Baumgartner, Isidor, Pastoralpsychologie: Einführung in die Praxis heilender Seelsorge, Düsseldorf 1990.

1.2. La préparation au mariage

  • Engl, J.; Thurmaier, F.; Eckert, V.; Hahlweg, K.; Drum übe, wer sich ewig bindet. Ehevorbereitung - Ein Partnerschaftliches Lernprogramm (EPL) - Langzeitergebnisse nach 3 Jahren in: Dialog 2 (1994).
II. La vie familiale
  • Baumann, Urs, Utopie Partnerschaft. Alte Leitbilder - Neue Lebensformen, Düsseldorf 1994.
  • Jellouschek, Hans, Die Kunst als Paar zu leben, Zürich 1995.

2.1. Les points forts de la culture familiale contemporaine

  • Beham, Martina; Dinges, Stefan, Blickpunkt Familie, in: Detailanalysen zur Europäischen Wertestudie 1990 im Schwerpunkt Östereich unter 7 Blickpunkten. Eine Untersuchung am Institut für Pastoraltheologie und Kerygmatik an der Katholisch-theologischen Fakultät der Universität Wien in Zusammenarbeit mit dem Ludwig-Boltzmann-Institut für Werteforschung, Wien 1994.
  • Heller, Andreas, Beziehungslandschaften im Wandel. Sozialwissenschaftliche Aspekte und neue theologische Themen, in: Moltmann-Wendel, Elisabeth (Hg.), Frau und Mann. Alte Rollen - Neue Werte, Düsseldorf 1991, 47-82.

2.2. Les points faibles de la culture familiale contemporaine

  • Schmidbauer, Wolfgang, Die Angst vor Nähe, Reibeck 1985.
  • Beck, Ulrich; Beck-Gernsheim, Elisabeth, Das ganz normale Chaos der Liebe, Frankfurt 1990.
  • Beck-Gernsheim, Elisabeth, Arbeitsteilung, Selbstbild und Lebensentwurf. Neue Konfliktlagen in der Familie, in: Kölner Zeitschrift für Soziologie und Sozialpsychologie 44 (1992), 272-291.
  • Beck-Gernsheim, Elisabeth, Das halbierte Leben: Männerwelt Beruf, Frauenwelt Familie, Frankfurt a.M. 1980.

2.3. La politique familiale

  • Ein Überblick über die aktuelle Diskussion bietet: Badelt, Christoph; Schattovits, Helmuth (Hgg.) Familienforschung. Referate und Statements d. 5. Interdisziplinären Symposiums 1994, Österreichisches Institut für Familienforschung, Wien 1996.

2.4. La pastorale familiale

  • Siegers, Conrad M., (Hg.) Ehe- und Familienpastoral. Ein Werkbuch, Düsseldorf 1988.
III. La famille en crise

3.1. Conseiller les familles

3.2. Diaconie familiale

3.3. Les séparations

  • Proksch, R. Wohl des Kindes. Systemische Konfliktlösungen im Scheidungsverfahren, Nürnberg 1991
  • Hartmann, Peter H., Warum dauern Ehen nicht ewig? Eine Untersuchung zum Scheidungsrisiko und seinen Ursachen, Opladen 1989.
  • Figdor, Helmuth, Kinder aus geschiedenen Ehen: Zwischen Trauma und Hoffnung, Mainz 1994.
  • Riedel-Spangenberger, Ilona, Die Rechtsstellung der in kirchlich ungültiger Ehe lebenden Katholiken. Kirchenrechtliche Aspekte und Lösungsangbote zum Problem von Scheidung und Wiederheirat, in: Schneider, Theodor (Hg.) Geschieden - Wiederverheiratet - Abgewiesen? Antworten der Theologie, QD 157, Wien-Freiburg-Basel 1995, 236-253.
  • Puza, Richard, Die gescheiterte Ehe. Eine Anfrage an die kanonistische Praxis und Lehre, in: Theologische Quartalsschrift 175 (1995) 97-109.
  • Schick, Ludwig, Die wiederverheirateten Geschiedenen und das Unbehagen sowohl über die kirchlichen Eheprozesse als auch über die Zulasssung zu den Sakramenten. Anmerkungen und Anregungen zu brisanten Themen, in: Fides et Jus (FS Georg May), Regensburg 1991.
  • Primetshofer, Bruno, Ehescheidung und Wiederverheiratung im Kirchenrecht, in: Theologisch-praktische Qartalsschrift 142 (1994), 343- 350.

3.4. Divorcé et remarié

  • Schneider, Theodor (Hg.) Geschieden - Wiederverheiratet - Abgewiesen? Antworten der Theologie, QD 157, Wien-Freiburg-Basel 1995.

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Dr fr. Ljudevit Rupčić

MARIE ET LA FAMILLE

Dès le commencement, l’Écriture Sainte et la Tradition mettent en relief, à côté du Sauveur, une Femme dont la figure se profile progressivement avec de plus en plus de clarté. (Cf. Gn 3,15 ; Ex 7,14 ; Mi 5,2-3) Son Fils, descendant du genre humain, est à la fois celui qui écrase la tête du Serpent - de Satan, et celui qui est l’Emmanuel - Dieu avec nous. (Cf. Mt 1,23)

Du point de vue biblique, c’est la maternité de Marie qui est le plus soulignée. C’est ce titre qui est le plus riche en contenu et plus significatif. C’est par sa maternité que Marie est entrée dans la plus grande intimité avec Dieu dans le Christ, la plus grande intimité dont une créature est capable.

L’Incarnation du Fils de Dieu dans le sein d’une femme (cf. Ga 4,4) fait partie de la volonté éternelle de Dieu d’être uni autant que possible à l’humanité tout entière, et par elle, à toute la création. L’Incarnation du Fils de Dieu devait rendre l’homme capable d’avoir part à la nature divine en devenant membre du Corps du Christ. Une des dimensions de l’Incarnation consiste dans le fait que toute l’humanité est appelée à prendre activement part à la divinisation, car le salut devait s’accomplir dans l’histoire à travers l’Homme. Il est donc essentiel d’avoir part à l’humanité du Christ et à l’incarnation progressive de son corps (mystique). La participation au corps vivant du Christ implique également la participation à sa réalisation et à sa croissance. La participation des membres individuellement, en tant que transmetteurs nécessaires du salut, démontre le rôle incomparable et irremplaçable de Marie. Par sa maternité, elle est en relation vitale au corps physique individuel et le corps mystique du Christ, constitué du Christ lui-même et des personnes concrètes. « La maternité de Marie se manifeste comme la plus haute et la plus réelle participation à l’humanité du Christ, et comme la participation la plus haute des membres à Son œuvre rédemptrice. »[1] Par la puissance de sa maternité par rapport au Christ, Marie est devenue Mère de tous les hommes, et tout particulièrement des croyants. Le principe qui relie par un lien de cause à conséquence tous les hommes les uns avec les autres et tous les hommes avec Marie, c’est le principe de solidarité à l’intérieur du corps mystique du Christ. (Cf. 1Co 12,26 ; Col 1,24)

Les œuvres et les mérites d’un membre du corps concerne tous les membres. Chaque grâce dans ce corps est la grâce de la Tête commune à tous les membres, et ce qui est donné à un membre « devient en lui une source de force pour les autres, avec qui il est solidaire. C’est d’abord et pleinement valable lorsqu’il s’agit de Marie. C’est à elle, qui a reçu d’une manière originelle la source de la vie, qu’appartient la maternité spirituelle à l’égard de tous les membres de l’Eglise. »[2] Cependant, cette maternité ne remplace en rien, « ni n’obscurcit, ni n’amoindrit, mais au contraire manifeste la force »[3] du seul médiateur entre Dieu et les hommes, l’homme Jésus Christ, qui s’est livré lui-même en rançon pour la multitude. (Cf. 1Tm 2,5-6) La médiation du Christ a une signification universelle, mais non exclusive. Elle n’exclut pas, mais au contraire, elle inclut la médiation de Marie et d’autres membres du corps mystique du Christ. « La propriété de la grâce rédemptrice du Christ est d’élever les hommes à participer à la nature divino-humaine et à l’œuvre de la Rédemption. »[4] Le rôle de Marie ne peut pas être conçu à côté du Christ ni indépendamment de Lui, mais avec Lui et en fonction de Lui. Marie est au sens plénier « la Mère de la grâce divine ». La qualité particulière de la grâce de la maternité divine de Marie, reçue du Christ, est que cette maternité est devenue son mérite. Dans ce mérite, le Christ couronne ses propres mérites et sa grâce.

LA NATURE DE LA MATERNITÉ DE MARIE

L’Écriture Sainte n’insiste pas tellement sur la maternité physiologique de Marie, puisque l’essence et la grandeur de sa maternité divine ne peuvent pas être situés sur ce plan là. Marie est bienheureuse parce qu’elle a cru (cf. Lc 1,45) et non parce qu’elle a porté en son sein et allaité le Fils de Dieu (cf. Lc 11,27-28). C’est par la foi qu’elle est devenue pleinement Mère de Dieu, c’est par la foi qu’elle a conçu le Fils de Dieu. Il ne pouvait pas en être autrement, puisque la Parole de Dieu adressée à Marie révèle le Dieu personnel qui veut se donner aux hommes. La Parole elle-même contient la révélation et ne peut être reçue autrement que par la foi. Dieu se révèle, et Marie répond à cette révélation. Sa réponse est un acte de foi parfait et universel : « Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole ». (Lc 1,38) C’est l’abandon total à Dieu qui se révèle parfaitement dans le Christ. « La mission propre à Marie, c’est de Le recevoir »[5] et elle L’a « reçu dans son cœur et dans son corps. »[6]

La maternité de Marie n’est pas son affaire privée. Le Christ a offert le salut à tous les hommes, et Marie l’a reçu pour elle-même et pour le monde entier, parce qu’elle a été la première, et en tant que telle, la représentante du genre humain. Notre salut est fondé sur son « oui » qui retentit pour toute l’éternité.[7] Elle est « la porte par laquelle la Parole éternelle du Père est entrée dans le monde », pour que Dieu puisse « introduire ce monde dans sa propre vie, et pour toujours ».[8] Par sa maternité, Marie est « d’emblée et d’avance introduite dans ce grand, inconcevable, immense drame qui se déroule entre le Dieu éternel et ce monde avec son humanité ».[9] La grâce de la maternité de Marie est une grâce pour l’humanité ; elle est « vraiment identique » à la grâce que Dieu donne à tous les hommes, et qui « développe ses effets dans le temps et pour chaque individu jusqu’à la Parousie ».[10] C’est ainsi que la maternité de Marie est entrée dans l’histoire de la foi et du salut. Elle n’est pas et ne doit pas être comprise d’une manière « purement physiologique, mais... comme un acte de foi, libre et personnel, dans l’histoire du salut ».[11] Le salut de tous les hommes est lié à cette maternité. Il est vrai qu’il a sa source uniquement dans le Christ, mais le Christ est venu chez les hommes par Marie. En se tenant à la source de l’Incarnation du Fils de Dieu, Marie a été, et elle reste, la médiatrice de tout ce qui s’en suit, ce qui veut dire, médiatrice de toutes les grâces. Le rôle médiateur de Marie dans l’œuvre du salut ne s’épuise pas, et ne finit pas, par la mise au monde du Sauveur et par sa fidélité qui va jusqu’à la Croix. Sa maternité est immanente à l’Église et « une réalité actuelle ici et maintenant ».[12] Elle est un service salvifique « qui continue sans interruption jusqu’à la consommation définitive de tous les élus ».[13] Il n’y a pas de grâce ni de salut qui ne porteraient pas le sceau de Marie et ne dépendraient d’elle. La participation de Marie à l’œuvre du salut est une grâce, mais une grâce qui, par sa maternité, devient son bien propre, et par la suite, le bien propre de tous les hommes. C’est pourquoi il est possible d’affirmer que le salut du monde est de nature christologique et mariale.

LA MATERNITÉ DE MARIE ET LA FAMILLE

La grâce que le Christ donne à Marie est destinée à toute l’Église. La grâce qui fait de Marie « la Vierge pure et la Mère féconde », fait pareillement de l’Église une Vierge pure et une Mère féconde. C’est en Marie que « se manifeste la signification de l’Église, de la grâce, de la Rédemption et du salut qui viennent de Dieu ».[14] Elle est la révélation et la preuve de ce qui appartiendra à l’Église. « Ce que Marie possède doit essentiellement nous appartenir aussi. »[15] Cela nous appartient déjà, mais d’une manière invisible, imparfaite et inaccomplie.

La relation entre Marie et l’Église comprend aussi la relation entre Marie et la famille, puisque l’Église est la famille de Dieu, et la famille est l’Église. La causalité ministérielle du salut en Marie concerne aussi la famille en tant que sacrement de la grâce et du salut. Cette grâce est dans un certain sens la grâce de Marie. Il est impossible de tout exprimer à la fois et en un mot, parce que les relations de Marie avec l’Église et avec la famille sont complexes et au-delà de notre expérience. C’est pourquoi, quand il s’agit du lien entre la grâce de Marie et la grâce du sacrement du mariage, il ne faut pas oublier que la première grâce de Marie est celle de sa maternité divine qui a germé au cœur de la Sainte Famille. C’est pourquoi, cette grâce porte un caractère familial. Cette grâce jaillit de la famille, et à son exemple, elle fait surgir des images vivantes et véridiques dans l’Église et dans les familles. La maternité de Marie est « la plus grande grâce jamais reçue et le plus grand salut. À l’exemple de sa maternité et par analogie, chaque grâce reçue, ainsi que le salut, ont un caractère maternel, en fonction du Christ et selon la paternité de Dieu ».[16]

Marie est, en quelque sorte, une valeur familiale. C’est dans la famille que Marie est devenue l’Immaculée Conception, Mère du Fils de Dieu et Mère de tous les hommes. Dieu Lui-même est venu d’abord dans une famille, et par elle, dans le monde entier. C’est dans la famille que Dieu a commencé son dialogue avec les hommes, c’est aussi au sein de la famille que Dieu a reçu la réponse à sa Parole. C’était la réponse d’une femme mariée. Sa réponse inclut la réponse de tous les sauvés, c’est dans sa réponse que toutes les réponses deviennent efficaces. Il est théologiquement très important que le rôle de Marie dans le salut du genre humain soit lié à la famille. C’est dans la famille que se réalisent définitivement et pleinement la rencontre et la relation authentiques entre Dieu et l’homme. La dimension physiologique de la famille comporte une dimension du salut.

La Sainte Famille exprime la réalisation des relations les plus intimes et les plus sublimes entre Dieu et l’homme. Elle exprime également la grâce et l’effet de la grâce qui se manifeste à travers la parfaite réponse humaine. Par sa nature, cette grâce se donne à tous et réalise ses effets en tous. Chaque famille est une image, une réalisation et une actualisation de la Sainte Famille. Ceci est aussi valable pour l’Église universelle que pour chaque famille individuellement. Le mariage chrétien est un mystère du Christ et de l’Église. Il est la concrétisation de l’amour du Christ pour l’Église ainsi que le signe de la réalité surnaturelle du mystère de la nuptialité humaine et divine. Car il y a la nuptialité humaine et il y a la nuptialité divine. Puisque l’une est sainte, l’autre est sainte aussi. Marie est présente dans les deux en tant que mère, car les deux ne font qu’un - seule la manière de la réalisation diffère entre l’une et l’autre.

L’appel à devenir la Mère du Fils de Dieu que Dieu adresse à Marie n’exclut pas, mais présuppose et nécessite le mariage. Le fils de Marie doit être le fils de David par le mariage entre Marie et Joseph, descendant de David.[17] En tant qu’enfant des hommes, le fils de Marie a le droit à la chaleur familiale, à la sollicitude paternelle et à la protection de son enfance. L’alliance de Marie et de Joseph fait donc partie de sa vocation maternelle.[18] Son enfant, vrai homme et vrai Dieu, exige ce lien. L’amour conjugal et l’amour parental sont ainsi en fonction de l’Enfant et consciemment au service de l’Esprit Saint.

Le mariage de Marie était réel, bien qu’il n’y ait pas eu d’union corporelle entre Marie et Joseph. Par son intervention divine, Dieu lui-même l’a mené à son plein accomplissement, et l’amour conjugal à sa pleine fécondité. La nature de la maternité divine de Marie, à laquelle tout a été subordonné, devait exclure la participation de l’homme. À cause de la nature absolument gratuite de la Rédemption, l’homme n’avait pas à y jouer un rôle. C’est pourquoi Marie a conçu par l’Esprit Saint. « Cette conception était un événement par excellence de la grâce et de sa foi. »[19] Marie est devenue la mère du Verbe de Dieu autant par sa foi que par son abandon personnel et absolu à Dieu. Dans le mystère de l’Incarnation, le rôle de la personne se trouve réduit à l’accueil par la foi, à cause de la nature de la Parole de Dieu et de son caractère salvifique. C’est pourquoi Marie est nécessairement Vierge et Mère. Le lien entre les deux, c’est son abandon sans réserve à Dieu dans une foi inconditionnelle, personnelle et obéissante. La grâce de sa virginité est « un rayonnement intérieur, conséquence de sa vocation à la maternité divine ».[20] La virginité de Marie est intimement liée à sa maternité et procède, comme elle, de l’abandon absolu et de la disponibilité à la volonté de Dieu, qui se sont manifestés dans les paroles : « Voici la servante du Seigneur ! » La naissance virginale du Christ ne veut aucunement signifier le mépris ou la condamnation de la paternité terrestre, au contraire, elle est la preuve et la manifestation de la pleine gratuité de l’œuvre du Dieu miséricordieux. Le Christ ne vient pas de la puissance intrinsèque au monde, son origine n’est pas dans le saint amour humain. Le Christ vient d’en haut. Le monde, ses conditions, ses exigences, ses possibilités immanentes n’offrent aucune raison « pour que Dieu descende dans l’histoire ».[21] C’est parce que le Christ « n’est pas de ce monde, mais d’en haut » que Marie est vierge.[22] La grandeur et la gratuité parfaite du don devaient s’exprimer dans l’esprit et dans le corps de Marie. La seule mission de sa vie est d’être Mère de Dieu, créée pour la grâce et ouverte à elle.

La virginité et la maternité de Marie peuvent paraître au premier abord comme incompatibles. Si on y réfléchit bien, on voit qu’au contraire, l’une est la condition de l’autre : de par sa logique surnaturelle, la maternité divine suppose la virginité comme composante nécessaire.

Saint Augustin avance la thèse selon laquelle Marie aurait fait un vœu de virginité et, ayant trouvé en Joseph un homme qui avait pris la même décision, elle aurait conclu avec lui un mariage virginal. L’Écriture Sainte n’offre pas de preuve suffisamment claire en faveur de cette opinion. À l’Annonciation, Marie pose la question à l’ange : « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? » (Lc 1,34) En hébreu et en araméen, ce texte peut signifier : « Comment cela se fera-t-il puisque je ne veux pas connaître un homme ? » Selon les données bibliques, il est possible qu’il en soit autrement que ce que pense Saint Augustin. La plénitude de la grâce qui était en Marie l’a rendue capable d’être parfaitement disponible à Dieu. Comme toutes les jeunes filles juives et sans aucune révélation particulière, elle s’est décidée pour le mariage, pensant que c’était la volonté de Dieu. L’attitude commune à son entourage l’a aidée à voir sa vocation dans les valeurs du mariage ; elle l’a accueilli dans la profonde conviction que c’est ainsi qu’elle pourrait le mieux répondre à la volonté de Dieu. Dans cette optique, on peut reconnaître l’affirmation du mariage et de la sexualité en général.

La nature du salut et de la Maternité divine exige néanmoins que cette maternité soit virginale. La virginité ne diminue cependant pas l’honneur et la dignité du mariage, dont la fécondité est bénite par le sacrement du Christ. Par sa virginité, Marie affirme devant les mariés et devant les célibataires que chaque personne doit être prête et disponible à la grâce d’en haut. Elle affirme que tout autre bien, même reconnu par la loi, comme le mariage, vient à la deuxième place, car le salut est un pur don d’en haut.

Joseph et Marie étaient vraiment époux et épouse. Leur mariage est donc un vrai mariage avec toutes les conséquences du mariage. Marie aimait son mari d’un amour personnel et vrai, mais, comme elle avait une âme immaculée, son amour avait toujours en vue l’abandon total à Dieu. À cause de la plénitude de la grâce qu’elle portait en elle, son amour conjugal ne pouvait pas se séparer de son amour de Dieu. « Dans la Sainte Famille, l’amour conjugal et l’abandon total à Dieu ont pu être réellement un, ils ont pu être identiques comme nulle part ailleurs. »[23]

L’abandon à Dieu peut être vécu par la médiation du mariage, mais aussi en dehors du mariage. Ce qui est commun, c’est toujours l’abandon à Dieu. Le mariage et la vie célibataire qui excluraient l’abandon à Dieu pourraient tous les deux être jugés également négatifs. Toutes les personnes n’ont pas les mêmes charismes. (Cf. 1Co 7,7) Chacun est appelé à l’état de vie qui lui permet de mieux s’abandonner à Dieu. Marie pouvait s’abandonner totalement à Dieu dans le mariage, parce qu’elle était pleine de grâce. En aimant Dieu parfaitement, elle a parfaitement aimé son mari. Par son abandon personnel à Dieu dans une foi profonde et personnelle, elle est un modèle pour les mariés comme pour les célibataires. Tout amour conjugal doit être transparent à l’amour de Dieu. L’amour conjugal de Marie était dans ce sens « plus transparent que chez d’autres, y compris chez les rachetées ».[24]

L’abandon total à Dieu conduit ordinairement au célibat, ce qui ne doit pas induire la conclusion que, dans la religion chrétienne, le mariage est considéré comme inférieur. Du point de vue de l’éthique, la continence n’est pas supérieure aux relations conjugales. En ce qui concerne l’appartenance au corps mystique du Christ, il n’est pas moins digne d’être marié que d’être célibataire. La différence réside dans le fait que les personnes mariées s’abandonnent à Dieu par un intermédiaire, et les célibataires sans intermédiaire. Une personne mariée est divisée, c’est pourquoi son abandon à Dieu est diminué. Comme la nature de l’amour exclut la bigamie et l’adultère pour des raisons psychologiques, et non sexuelles, l’abandon total à Dieu exclut l’abandon à une personne humaine. (Cf. Mt 19,12.19, 1Co 7,32-34) Par sa mission, Marie était tellement abandonnée à Dieu dans le Christ, qu’elle ne pouvait pas chercher un quelconque attachement en dehors. C’est pourquoi Matthieu dit : « la Mère et son Enfant ». (Mt 2,11) L’abandon total de Marie à Dieu était la source de sa virginité, y compris après la naissance de l’Enfant.

En fonction de tout ce qui a été dit, la vie conjugale de la Sainte Famille n’est pas une exception, mais la forme la plus sublime du mariage qui peut être caractérisée comme eschatologique. À la résurrection, il n’y aura plus de mariage dans le sens terrestre, mais il y aura la connaissance et l’amour. C’est ainsi que le sens du mariage sera pleinement réalisé, parce que Dieu, qui est Amour (cf. 1Jn 4,8), sera tout en tous (cf. 1Co 15,28). Cette réalité était déjà présente dans le mariage de Marie. Le mariage chrétien ordinaire passe par la réalisation corporelle et la naissance humaine. Il doit néanmoins rester ouvert à un accomplissement de plus en plus grand en Dieu, sans pour autant artificiellement quitter sa propre voie.[25] Le Christ lui-même a sanctifié la vie conjugale de Marie et de Joseph en tant qu’Enfant de leur mariage. Il l’a rendu parfait en perfectionnant la relation entre Dieu et l’homme.

LA MÈRE ET LES MÈRES

L’Incarnation du Fils de Dieu avait en vue l’incorporation des hommes au corps mystique du Christ. La maternité de Marie comme accomplissement de l’Incarnation inclut la maternité de toutes les mères. La maternité de Marie n’est pas seulement l’exemple, mais également la cause de toute maternité sur cette terre. C’est pourquoi toute maternité comporte une dimension de grâce. Son but est de donner au Christ les membres sans lesquels il ne parviendrait pas à sa plénitude. Toute maternité est donc orientée vers le Christ et ne s’épuise absolument pas dans sa valeur physiologique. Toutes les mères sont mères par la maternité de Marie, toute maternité a sa source en Marie, mais chacune est acceptée personnellement et réalisée personnellement. Leurs enfants, que le Christ appelle ses frères, ont la même Mère que Lui, Mère qui est présente en toutes les mères. Elle a son origine dans le mystère de Dieu qui a voulu que son Fils devienne un homme parmi une multitude de frères.

Ce même mystère qui a commencé en Marie se poursuit dans les cœurs des fidèles, et particulièrement des mères. Il s’agit de « l’enfantement et de la croissance du Christ conçu par le Saint Esprit ».[26] Dans le corps du Christ, Marie est comme un facteur héréditaire au sens physiologique (qui règle de l’intérieur le développement du cours de la vie). Tout ce qui suit prend en elle son activité et sa forme. Marie est un organe vivant qui sert à la régulation du cours de la vie que Dieu a fondée parmi les hommes par son Incarnation.[27] La présence de Marie est vivante et active partout dans l’Église.

Toute maternité est essentiellement une attitude à l’égard du Christ : chez Marie directement, chez d’autres indirectement. La maternité de Marie est pure grâce et pur acte de Dieu. Le rôle de l’époux est comme absent, et Marie est pur accueil. Le Rédempteur n’est pas le fruit de l’effort de l’homme, mais le don de Dieu. On peut quand même établir un parallélisme entre la maternité de Marie et toute autre maternité. La différence est énorme, et c’est pourtant le même Dieu qui est à l’œuvre, mais d’une autre manière. Toute maternité est un don de Dieu. Aucune personne humaine ne peut créer un enfant. C’est Dieu seul qui le crée. Chez Marie, l’activité humaine est exclue et chez les autres elle est incluse. La différence des manières ne touche pas à la vérité fondamentale que toute maternité est un don de Dieu. Marie est un exemple éclatant de l’adhésion à ce don et de la responsabilité personnelle pour lui. En répondant positivement au message de l’ange, Marie est « au sommet de son rôle ».[28]

La famille est une institution voulue par Dieu. En elle, tout est don. C’est particulièrement évident dans la Sainte Famille. Le don, c’est Marie, c’est Joseph et c’est l’Enfant. Toute la structure est au service de l’Enfant, du Christ. Joseph prend la Mère de l’Enfant pour épouse. Marie, étonnée, accepte le projet de la maternité qui vient de Dieu. Depuis l’Annonciation, elle se met entièrement au service de son Fils. Son adhésion, en tant qu’expression de sa foi, est le programme de sa vie et son attitude fondamentale envers Dieu. Depuis le premier instant de la conception jusqu’à la mort sur la croix, elle suit Dieu dans la nuit de la foi en mettant ses pas dans ceux de son Fils : la Nativité dans la grotte, la présentation au Temple, la fuite en Egypte, le soin pour la vie de l’Enfant, la mort sur la croix. Chaque pas de Marie était un pas dans la foi jusqu’à son Assomption dans la gloire. De Nazareth au Golgotha, elle n’est jamais sortie de la « nuit de la foi ».[29] Le cheminement de cette Mère est le chemin que devraient trouver toutes les mères et tout homme en général. La maternité de Marie vient de la foi, c’est par la foi qu’elle a grandi et qu’elle s’est épanouie. Elle coopère avec le don qui inclut un développement à travers la liberté humaine. Tout n’est pas donné d’un seul coup, et ce qui est donné est donné pour se développer jusqu’au bout. « La Bible ne nous présente pas une Marie omnisciente pour laquelle son Fils ne serait plus un mystère, mais une fidèle disciple de son Fils qui se laisse conduire pas à pas dans la foi. »[30]

La maternité de Marie est présente dans les mères chrétiennes. La structure en est la même, quoi que plus intense chez Marie, en accord avec la plénitude de grâce dont elle bénéficie. Ce n’est pas la dimension physiologique ou biologique, mais spirituelle, celle de la foi, qui est la plus importante. « Heureux plutôt ceux qui écoutent la Parole de Dieu et qui la gardent ! » (Lc 8,28) L’engendrement des enfants en tant que membres du Christ suppose que ceux qui les engendrent « écoutent la Parole de Dieu et la mettent en pratique ». (Lc 8, 21) C’est ainsi que chaque personne devient pleinement et vraiment « mère du Christ ». (Mc 3,35) La maternité trouve sa racine dans la foi et doit se laisser conduire par la foi. Il faut l’accueillir et, en elle, rester toujours ouvert à Dieu. Le mariage et la maternité sont donc relatifs au Christ. Par Lui, ils sont sanctifiés, par Lui, ils sont orientés, en Lui, ils ont leur finalité. Tout mariage et toute maternité sont un service du Christ dans l’obéissance de la foi.

La maternité n’est pas un acte, surtout pas un acte physiologique, mais un processus de la grâce. Comme la foi, elle est un acte fécond et permet que le Christ soit formé dans les personnes. « Elle répand autour d’elle, en direction des cœurs des autres, la force de la foi et de l’amour. C’est ainsi que le Christ est engendré dans les cœurs. »[31] Par Marie et avec Marie, chaque mère trouve de l’espace pour accomplir « ce qui vaut éminemment pour Marie »[32] : donner la vie, en se mettant au service du mystère de la Rédemption, comme Marie.[33] Toutes les mères doivent accueillir la parole de Dieu dans la nuit de la foi, comme Marie, et entrer par la foi dans l’œuvre rédemptrice du Christ. Cette participation est significative pour toute la communion des saints. Marie est la première et la plus significative. Les autres doivent la suivre et continuer son œuvre. Le « oui » de Marie pour devenir la Mère du Fils de Dieu signifie en même temps l’acceptation du chemin et de la mission de son Fils : révéler le Père. En cela, Marie est pleinement à sa disposition. Mourant de plus en plus à elle-même, elle devient la servante de la mission de son Fils. Elle écoute la Parole de Dieu, elle la garde dans son cœur, elle la médite, elle vit et se comporte en accord avec cette parole, elle est toujours ouverte à Dieu.

La maternité implique les mêmes engagements chez les mères chrétiennes. L’intensité de la maternité par rapport au Christ n’apporte dans ce sens aucune différence essentielle. Les différences concernent le degré de la grâce, le cheminement et les possibilités, adaptés à chaque mère personnellement. La maternité humaine a une dimension rédemptrice. Les parents enfantent leurs enfants par la foi, l’amour et l’espérance. La foi est un héritage par lequel on peut accueillir et transmettre Dieu qui s’est révélé et qui s’est donné dans le Christ. (Cf. 1Tm 1,5) La maternité est de l’ordre de la grâce et manifeste le développement naturel de la grâce. Par sa nature, elle est une « relation interpersonnelle »,[34] en premier lieu relation à Dieu dans le Christ. (Cf. Mt 25,40)

Chaque naissance est pleine de promesses, bien que l’enfant vienne de la volonté mystérieuse de Dieu, trop insaisissable pour les hommes. L’Incarnation du Christ éclaire et sanctifie toute naissance humaine. Elle nous rend fièrs et reconnaissants d’appartenir au genre humain.[35] La grotte est le témoin des miracles et des dons que Dieu déverse dans les cabanes, dans les maisons de pauvres paysans, dans les caves et les baraques des villes. Ces dons sont les enfants, dont le Fils de Marie a fait ses frères, enfants du même Père - Dieu, et de la même Mère - Marie.

La Sainte Famille montre que la plus parfaite des structures n’est jamais un but en soi : c’est tout particulièrement confirmé au Temple de Jérusalem, à Cana et au pied de la croix. Dans la famille, tout est en fonction du Christ. L’essence du mariage, c’ est l’expansion de l’amour du Christ et la déification du monde avec le Christ et dans le Christ.

Le don sublime de la maternité respecte et affirme la personne. Pour Dieu, les personnes ne sont pas des objets inanimés et muets, mais des êtres intelligents et personnels. Ni Marie, ni aucune mère, n’est jamais réduite à l’objet. Adressant sa parole personnelle, Dieu attend une réponse personnelle. La nature et la structure de la foi sont intrinsèques à la maternité, d’où son effet rédempteur. (Cf. 1Tm 2,15)

Par son Immaculée Conception, Marie affirme la sainteté de l’acte conjugal. Née de parents humains et à la manière humaine, elle est pure. L’acte conjugal n’a donc rien d’impur en lui-même. L’engendrement de la personne dans la famille est « un événement que Dieu veut, et il est saint ».[36] L’union de l’homme et de la femme n’est pas une malédiction, mais un acte créateur de Dieu. Seules les souffrances de l’enfantement sont une conséquence de la malédiction d’Adam.

LE SACREMENT DE LA VIE QUOTIDIENNE

Le cadre familial est un climat favorable au développement et à l’épanouissement complet de la femme. Le combat pour l’émancipation n’est pas toujours un combat en faveur de la femme. Marie a vécu modestement, elle n’a été ni connue ni reconnue, ce qui est la preuve que la vie quotidienne d’une femme pauvre et simple ne réduit ni la liberté, ni l’honneur, ni l’épanouissement de la femme. En vivant dans des conditions modestes et pauvres, Marie a obtenu d’être « élevée au-dessus des anges ». « Une vraie personne » a vécu dans ce monde, « une personne en chair et en os qui pleurait, qui souffrait, qui connaissait la pauvreté et les ténèbres, et qui n’était rien que pureté, bonté, amour de la croix, une personne de Dieu par excellence... »[37] Son excellence était cachée dans la vie quotidienne banale d’une personne ordinaire. Marie est la preuve que, dans ce monde plein de ténèbres, de faiblesse, de misère, d’ignorance et de fatigue, Dieu récompense ceux qui L’aiment et ceux qu’Il aime, ses enfants qui vivent la Vie de l’Esprit.

Du début de sa vie jusqu’à l’Annonciation, nous ne savons rien sur Marie. Ce silence est « plus éloquent que toute parole ».[38] Le peu que la tradition de l’Église à retenu à propos de Marie dit clairement que sa vie était tout à fait ordinaire : en apparence seulement car, en réalité, profondément spirituelle, pleinement humaine et pleinement divine, la preuve évidente du fait que tout ce qui est quotidien et ordinaire dans la vie de la famille est sanctifié. Le quotidien devient un vrai sacrement, le surnaturel y est présent. Tout devient service de Dieu dans la foi et l’amour.

Marie n’est pas une idée abstraite, mais une personne, une femme vivante et concrète qui vit dans la précarité et qui a des relations humaines comme toutes les personnes, femmes et mères. Cette réalité est une vraie preuve que « la source du bonheur ne se trouve pas dans la possession des biens de ce monde, mais dans l’accueil de la volonté de Dieu ».[39] La pauvreté, l’angoisse, le combat, la haine, l’exil, les larmes et la douleur du chemin étroit de la vie familiale ne sont pas en eux-mêmes des signes de malédiction, mais peuvent être une source de salut, s’ils sont reçus de la main de Dieu avec les paroles traduites dans la vie : « Qu’il me soit fait selon ta parole ! ». (Lc 1,38) Le renoncement, la chasteté et le travail ont aussi leur valeur. Les péripéties de la vie familiale, telles que Marie les a connues, par rapport à son mari, à sa conscience, à l’Enfant, au logement, au monde, montrent à quel point les efforts humains et la volonté de Dieu se croisent comme les fils d’un tissu. Elles montrent que la grâce, la sollicitude et la toute-puissance de Dieu se déversent au cœur de l’effort humain.

La vie de Marie témoigne également que les fruits du mariage vont au-delà de la mort. En Marie, nous voyons quel est le destin de la famille, comment le salut se manifeste et quelle est sa forme définitive.

L’Assomption de Marie dans la gloire nous enseigne que Dieu est le but ultime de l’homme. C’est pourquoi on ne peut justifier ni la vénération, ni le mépris du corps. Depuis la Résurrection du Christ, la glorification est une réelle alternative pour l’homme. En Marie, nous contemplons une anticipation de ce que nous serons un jour, réalité qui est déjà accomplie dans le Christ.[40]

Par son Assomption dans la gloire, Marie nous empêche d’être exclusivement attachés aux réalités de ce monde et de préférer des détails à la totalité du bonheur. Elle nous conduit, au contraire, à intégrer les détails à la totalité.

Marie est une révélation, un signe, une preuve de ce qui est promis à l’homme. Elle est le signe que la Résurrection de la Tête a pour conséquence la résurrection du Corps.

L’accomplissement des derniers temps de l’Église commence en Marie en raison de ses relations familiales. L’Église a donc raison de voir en elle son image définitive, qu’elle espère recevoir du Christ. Marie est la « summa Ecclesiae » par qui vient au monde entier le salut, sous la forme qui s’appelle la famille.

Notes :

1. Mysterium salutis, Band 111/2 Einsiedeln – Zürich – Köln, 1969

2. Leksikon für Theologie und Kirche, 2e édition, Das Zweite Vatikanische Konzil, Teil 1, Freiburg-Basel-Wien, 1967 : Dr. Otto Semmelroth, Kommentar 8. Kapitels Lumen Gentium, p. 337.

3. Lumen Gentium, N° 36

4. Semmelroth, 337

5. Müller, 16

6. Lumen gentium, N° 53

7. Cf. Karl Rahner, Maria Mutter des Herrn, Theologische Betrachtungen, Freiburg-Basel-Wien, 5e édition, 1965, p. 104-105

8. Rahner, 58

9. Rahner, 54

10. Müller, 437

11. Rahner, 54

12. Semmelroth, 337

13. Lumen gentium N° 62

14. Rahner, 34

15. Rahner, 37

16. Müller, 417

17. Cf. Müller, 416

18. Cf. Müller, 416

19. Müller, 416

20. Rahner, 36

21. Rahner, 67

22. Rahner, 68

23. Müller, 471

24. Müller, 471

25. Cf. Müller, 472-473

26. Lumen gentium N° 65

27. René Laurentin, La Vierge au Concile, 1965, Paris – Limburg, 1967, p. 175

28. Müller, 451

29. Müller, 486

30. Müller, 463

31. R. Laurentin, 18

32. Lumen gentium, N° 56

33. Lumen gentium, N° 56

34. R. Laurentin, 171

35. Cf. Jean Cantinat, CM, Marie dans la Bible, Lyon/Paris, 1963, p. 131

36. Rahner, 40

37. Rahner, 81

38. Bossuet, Élévations sur les Mystères, éd. D. de Bouvier, 1933, p. 692

39. J. Cantenat, 128

40. Cf. Rahner, 91

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Dr fr. Josko Srdanovic

LA FAMILLE DANS LE MONDE CONTEMPORAIN

I. INTRODUCTION

La famille, noyau fondamental de la nation et de la société, suit son propre développement, dispose de sa propre constitution intérieure, de son propre dynamisme et de sa propre vie. Elle est soumise aux divers changements historiques et à la pathologie de ses membres, particulièrement en ces temps de relativisation des valeurs et d’athéisation de la vie de l’humanité, devenue matérialiste. Dans la famille, on aime, on naît, on vit et on meurt. La famille transmet la vie et l’héritage spirituel, religieux et culturel. La famille porte en elle le substrat de la foi, de la culture et de l’histoire qu’elle transmet aux nouvelles générations. Bien que soumise aux influences et aux changements divers et variés, elle à réussi à se maintenir comme noyau des formes intimes et précieuses de communication interpersonnelle. Dans ce bref exposé, nous aborderons le mariage et la famille en général, le développement sain de la famille, surtout des enfants et des adolescents - futurs porteurs de la vie familiale et sociale, ainsi que les pathologies de la famille contemporaine.

II. À PROPOS DU MARIAGE ET DE LA FAMILLE

La famille est l’unité de base de la société, fondée sur la vie commune des personnes liées par les liens de sang et par les liens affectifs. Le plus souvent, elle est composée de parents et d’enfants, mais également de grands-parents, de tantes, d’oncles, formant ainsi la famille au sens large. La famille réunit en son sein plusieurs fonctions : la reproduction biologique, l’éducation, la fonction économique, socio-culturelle, morale, religieuse et patriotique. La famille, en tant que transmetteur de la vie, s’est maintenue au cours des siècles et des millénaires, et dispose ainsi d’une longue histoire et d’une longue tradition. La famille repose sur le mariage et l’amour. L’amour est le fondement de la vie commune dans le mariage, et les liens matrimoniaux durables sont la condition du bonheur familial et de la mise en pratique d’une parentalité responsable. Dans le mariage et la famille, les êtres humains peuvent satisfaire leurs besoins fondamentaux d’ordre émotionnel, intime et sexuel, matériel, social, spirituel, reproductif et culturel. Aucune institution ne peut offrir ou remplacer la chaleur du foyer familial : ni les jardins d’enfants, les écoles, les hôpitaux, les maisons de retraite. Le rôle biologique, reproductif et éducatif de la famille est essentiel. De nouveaux membres de la communauté humaine naissent en son sein et y entament leur processus de développement humain et de croissance. Dans cet environnement humain intime se manifestent les premières observations sensorielles et les premières notions de la vie et du monde, c’est ici que se forment les premières idées et les premières attitudes, que s’établissent les relations, que l’on reçoit les premières échelles de valeurs morales sur ce qui est bon, vrai, humain, saint etc., c’est ici que l’identité de la personne se façonne. Seuls les parents et les membres de la famille peuvent offrir autant de compréhension, de patience, de compassion, de renoncement altruiste, d’entraide et de soutien à tous ses membres, et particulièrement aux enfants et aux jeunes. C’est pourquoi, tout au long de l’histoire, le rôle éducatif de la famille a toujours été sa composante incontournable. Aujourd’hui, à une époque marquée par l’aliénation généralisée, par l’isolement affectif, par le sentiment de solitude et d’abandon, la famille s’est maintenue comme une cellule empreinte de chaleur, de confiance et de soutien, comportant les formes tellement nécessaires de contact interpersonnel. L’amour altruiste, qui se donne à l’autre et qui demande l’effort, l’application, le pardon et la réciprocité, est indispensable au mariage et à la famille. La famille est en changement perpétuel, chaque jour elle est différente, elle ennoblit les différences de caractère et les données historiques, développementales et biologiques de ses membres. Dans le mariage et dans la famille de nouveaux membres naissent, ce qui est important non seulement pour la famille, mais également pour la société et l’humanité. Il s’agit de la reproduction humaine de nouvelles générations et de la société, sans laquelle toute autre reproduction perd son sens.

III. LES PATHOLOGIES DE LA FAMILLE CONTEMPORAINE

La position et le rythme de vie de l’homme contemporain et de la famille ont considérablement changé, particulièrement dans les pays développés. Au cours des quelques dernières décennies, le regard posé sur la vie, sur le monde et sur ce qu’il offre (souvent des succédanés de la vie!) a été modifié. Ce que le monde nous offre est très souvent une contrefaçon de la vraie vie. Les liens familiaux se sont affaiblis, les deux parents travaillent et sont matériellement presque indépendants. Ils manifestent une attention de plus en plus centrée sur soi, recherchent une vie plus confortable et moins « chargée », dans le sens de la mise au monde et de l’éducation des enfants. La capacité de donner, nécessairement liée au sacrifice, semble faiblir dans le monde matérialiste ; nous sommes confrontés aux attitudes libérales et libertaires à l’égard de la sexualité et au rejet du rôle parental au nom d’une certaine « modernité », d’une certaine « émancipation ». Ce que l’on trouve à la racine, c’est un manque de foi dans le Dieu vivant, un manque de communication avec Lui et avec son Esprit dans la prière, un refus de vivre selon les commandements que Dieu a donnés à l’homme pour le protéger en tant qu’individu, en tant que famille, en tant que nation. On peut également constater un certain rejet de l’héritage identitaire de la famille, de la nation et de la foi, souvent sous l’influence de la science - qui n’est pas toujours au service de la vie et de l’homme, mais également sous l’influence des média et de la politique mondiale. C’est ainsi que - détachées la source de la vie, qui est Dieu - de nombreuses familles contemporaines vivent dans un certain vacuum et souffrent du vide intérieur spirituel et existentiel, du non-sens. De telles attitudes influencent les parents et les membres de la famille : ils sont de moins en moins joyeux et altruistes, deviennent de plus en plus insatisfaits d’eux-mêmes, prennent facilement la décision de supprimer l’enfant déjà conçu, éduquent leurs enfants et leurs jeunes sans leur donner le sens de la vie, se réfugient dan les mécanismes de défense et les compensations artificielles : les plaisirs, l’alcool, la débauche, la drogue. Tout cela conduit aux maladies psychiques et physiologiques, à la descente dans l’échelle sociale et à la dissolution de la communauté conjugale et familiale.

III. A. Quelques aspects du développement sain de la famille, surtout des enfants et des adolescents

Les familles, les parents en particulier, jouent un rôle irremplaçable dans la croissance, l’éducation et le développement de l’individu, pour en faire une personne saine, créative et capable de se comporter normalement dans la famille et au travail, un membre utile à la société. Cependant, les personnes de l’entourage proche et plus large, ainsi que le milieu dans lequel l’individu évolue, ont également leur importance. Il est donc nécessaire de stimuler le développement sain de l’enfant dès sa conception et sa naissance, afin d’éviter les états pathologiques qui menacent les enfants, les jeunes et les nouvelles générations de la société, ce que nous exposerons dans le chapitre suivant. Nous nous arrêterons ici uniquement à un aspect très significatif du développement de la personne : son identité et les conséquences des anomalies de cette partie de l’appareil psychique.

Nous parlons de diverses formes d’identité : identité personnelle, familiale, nationale, religieuse, sexuelle, professionnelle. Cette instance de la personnalité se forme à travers les phases du développement socio-psychologique et psycho-sexuel, et continue à se parfaire tout au long de la vie. Dans sa théorie structurelle, Freud divise l’appareil psychique en trois niveaux : le premier, la couche la plus profonde, c’est le id - ça, la partie inconsciente, le dépôt des pulsions qui contiennent l’énergie psychique. Au cœur des tensions, ces pulsions ont tendance à vouloir être satisfaites « ici et maintenant », tandis que les instances supérieures de la personnalité - le ego et le superego – le moi et le sur-moi - s’y opposent. Le deuxième niveau de l’appareil psychique, le ego – le moi, détient la fonction de contrôle : il va empêcher la réalisation des pulsions incontrôlées qui pourraient provoquer la peur. Ce niveau examine la réalité, permet l’adaptation de l’individu à l’entourage, pose les limites par rapport au monde extérieur, crée les mécanismes de défense. C’est la fonction qui permet la création de l’identité de la personne, la conscience de soi et de l’entourage. Le troisième niveau, c’est le super-ego – le sur-moi, dont la fonction est un plus grand contrôle de soi, la censure morale ; il réunit les normes morales et sociales, et commence à se former dès le troisième mois de la vie du nourrisson. À ce stade déjà, l’enfant établit ses premières relations émotionnelles aux objets, à ses parents ou aux personnes qui prennent soin de lui (les objets primaires). L’enfant sourit déjà et reconnaît les personnes, réagit par des mouvements. Les enfants développent ce niveau à l’exemple de leurs parents et des personnes avec lesquelles ils sont en contact.

Ces personnes sont pour eux des modèles – des exemples auxquels ils s’identifient : les enfants adoptent durablement certaines caractéristiques des personnes, considérées comme désirables. C’est ainsi que, très tôt, se produit la formation initiale : les caractéristiques marquant le caractère, les caractéristiques émotionnelles, sociales, morales, religieuses, sexuelles. Les parents et les personnes de l’entourage peuvent être des exemples ou des modèles, représentant les caractéristiques bonnes ou mauvaises, que l’enfant assimile, car il prend conscience de l’atmosphère qui règne dans la famille : est-elle chaleureuse, détendue ; quelle est la communication entre les parents ; prennent-ils du temps pour lui ; la mère, est-elle surchargée, frustrée ; le père, est-il chaleureux, agressif, sous l’influence de l’alcool ; quelle est la manière dont la famille résout les conflits ; les membres de la famille, savent-ils s’excuser, sont-ils unis, tolérants ; quelle est l’échelle de valeurs de la famille, sont-elle vivantes ; comment parle-t-on de Dieu : bien ou mal, va-t-on à l’église ; tient-on les promesses ? … La matrix fondamentale psychique, la matière pour construire la personnalité de l’enfant – futur porteur de la vie de la société – est reçue à la maison, dans la famille. D’autres institutions peuvent la compléter, construire là-dessus, donner les connaissances, etc.

III. B. Les formes pathologiques du développement dans la famille moderne

Les états pathologiques des enfants et des jeunes sont une conséquence du mauvais développement au sein de la famille. À notre époque, c’est particulièrement visible, en raison des modifications du style de vie et du regard posé sur la vie, en raison de l’influence négative des média, en raison de la politique athée conduite à partir des « centres de pouvoir », et en raison de l’aliénation des relations humaines. Les enfants et les jeunes d’aujourd’hui seront appelés demain à assumer les responsabilités et les obligations des générations qui les ont précédés. Il est important de savoir si un enfant a été désiré ou non lors de la conception, si un avortement a été envisagé ou non. Dans le sein de sa mère, l’enfant le ressent. Le fait de ne pas avoir été désiré peut produire en lui des traumatismes psychiques provoquant des tendances dépressives, le repliement sur soi, la méfiance, et même des comportements psychotiques destructeurs. Certains comportements à l’égard de l’enfant lors de sa toute petite enfance peuvent avoir des influences négatives sur la santé psychique de la personne : les parents - et particulièrement la mère – qui négligent gravement l’enfant ; tensions ou agitation perpétuelle dans la famille ; froideur émotionnelle ; manque d’intérêt pour les besoins psychiques et corporels de l’enfant, surtout manque de réponse à son besoin d’être sincèrement aimé, entouré de chaleur, de confiance ou d’attention. (Cette douleur psychique, que l’enfant ne peut exprimer en paroles, s’exprimera à travers des troubles psycho-somatiques. L’enfant cherchera ainsi à attirer l’attention sur lui.) D’autres éléments peuvent également jouer un rôle négatif : plusieurs personnes qui s’occupent de l’enfant (manque de stabilité de l’objet) ; séparation prolongée d’avec les parents (les parents à l’étranger, à l’hôpital, les enfants éduqués par les grands-parents) ; perte d’un parent sans que ce manque d’amour soit compensé par d’autres personnes… Ces événements peuvent provoquer des traumatismes à la puberté et à l’adolescence, lorsqu’on entre dans le monde des adultes, lorsque l’individu n’est pas capable de réaliser ce qui est attendu de lui en fonction de son âge : il s’agit de la névrotisation secondaire. Un tel développement conduit aux dégâts émotionnels et caractériels accompagnés de tendances à se replier sur soi, à être méfiant, égocentrique, perpétuellement affamé d’amour et de reconnaissance, sans capacité de donner. De telles personnes n’ont pas construit les défenses psychologiques ajustées dans les situations de stress et de frustration. Elles ont une forte tendance aux formes régressives de comportement (dépression, manque d’initiative, mauvais résultats scolaires, résistance par rapport aux parents et à l’autorité, tendance à s’associer à ceux qui dans la rue et à l’école, inspirent le respect, fuite dans l’alcool, la drogue, la promiscuité). La croissance et le développement de l’individu dans une famille malsaine conduit à la formation d’une fausse identité, d’une pseudo-identité, ce qui est un terrain dangereux, favorable à la formation des déviations plus profondes et à la pathologie socio-psychologique. Les jeunes membres de nos familles contemporaines deviennent ainsi des porteurs de la pathologie de leurs familles. Il est particulièrement défavorable et dangereux lorsque les enfants sont éduqués par des parents malades psychiques, présentant des formes de comportement socialement non désirables. Tout aussi négative est l’éducation surprotectrice, très pratiquée à notre époque, celle qui éloigne l’enfant des habitudes de travail, qui le prive de la responsabilité et des frustrations, qui attache l’enfant à l’adulte, empêchant ainsi son développement normal. De tels enfants deviennent des « petites divinités » de la famille. Un problème se pose également lorsqu’un enfant devient l’objet d’agressions de la part de ses parents, le lieu de règlement de leurs problèmes conjugaux ou professionnels ; également lorsque les parents considèrent la carrière, la construction de la maison ou la richesse comme plus importants que la création d’un espace chaleureux, marqué par la confiance, l’amour, et le soutien accordé à l’enfant. De tels parents investissent le minimum dans l’éducation de l’enfant. L’enfant est livré à lui-même, élevé dans la rue, par les groupes, les discothèques, les magazines et la télévision. Il y a de plus en plus d’enfants et de jeunes issus des familles modernes marquées par la discorde dans la vie quotidienne, par le manque d’amour vrai, de soutien et d’implication, et par le divorce des parents. Le divorce des parents est vécu comme un traumatisme majeur : de nombreux enfants, présentant des troubles dépressifs et autistes, finissent par être admis dans les cliniques psychiatriques. La vie des parents et des familles privés de la foi dans le Dieu vivant, méconnaissant la pratique de la foi dans leur vie quotidienne et la prière quotidienne en famille, l’indifférence grandissante à l’égard de Dieu et l’athéisation de la famille, sont les causes du manque de sens dans lequel la famille est plongée. Les jeunes de notre époque sont confrontés à ce manque de sens : ils vivent dans l’errance et sont en quête de ce qui pourrait combler le vide qu’ils ressentent. Il n’est pas rare qu’ils entrent dans des sectes, touchent à l’occultisme, à la drogue, à l’alcool, etc. Le meilleur des arbres du verger, s’il n’est pas régulièrement entretenu et émondé, ne portera pas de fruit, de même une personne, si son développement est laissé aux circonstances et au hasard. C’est pourquoi il est tellement important que l’amour des parents soit solide et inconditionnel, que les parents soient les amis de leurs enfants, pleins de compréhension et de soutien, même lorsque l’enfant ne réussit pas bien. Il est très important que les parents prennent du temps avec leurs enfants pour les éduquer, leur parler, jouer avec eux et répondre à leurs questions. Les cadeaux ne peuvent en aucun cas remplacer le besoin de chaleur, de proximité et d’amour parental : de tels cadeaux sont perçus par les enfants comme des succédanés. Il est nécessaire de faire souvent l’éloge de l’enfant, de l’encourager, de tenir les promesses, et très tôt, à partir de l’âge de trois ans, de le sensibiliser au travail et à la responsabilité.

VI. CONCLUSION

Dans ce bref exposé sur la famille contemporaine, nous pouvons affirmer que - malgré la rapidité des progrès scientifiques, malgré l’étendue des changements dans sa dynamique intérieure, sa structure, sa vie, le regard qu’elle pose sur le monde, malgré l’aliénation grandissante des personnes - la famille est restée une oasis marquée par la chaleur, le soutien, l’amour, le souci mutuel, les relations intimes, et celle qui porte la vie. La famille contemporaine est confrontée aux défis modernistes dans les domaines de la science, de la politique, des médias, marqués par l’athéisme, l’indifférence à l’égard de Dieu, et une saturation matérielle grandissante. De telles familles vivent souvent dans un certain vide et privées de sens de la vie, et c’est dans cet esprit qu’elles éduquent les futurs porteurs de la vie familiale et sociale. Ils ont recours à des formes diverses et variées de comportements et de compensations dangereuses, mettant ainsi en danger les fondements même des familles et de la société contemporaine et future. Pour ces raisons précises, nous nous sommes intéressés surtout à la croissance et au développement – bon ou mauvais - des enfants et des jeunes, ainsi qu’aux conséquences pathologiques que les services spécialisés rencontrent au jour le jour. Les familles croyantes se sont révélées plus stables et plus résistantes aux défis négatifs lancés par le monde. Dans la prévention des situations décrites ci-dessus, et pour favoriser un développement sain des enfants, des jeunes et de la famille, un rôle important devrait être joué par les services spécialisés : consultation pour les enfants, les jeunes et les parents (psychothérapie) ; programmes éducatifs diffusés par les moyens de communication sociale ; accompagnement des parents, des enfants et des éducateurs ; conférences, tribunes, contacts personnels, travail éducatif dans les écoles. La famille doit être particulièrement attentive à mettre en pratique son échelle de valeurs et à prendre conscience du fait que, dès la conception, l’enfant est une personne, une personnalité, qui demande l’amour, la confiance et l’attention, car l’enfant est un don de Dieu et exige notre reconnaissance à l’égard du Donateur de vie. Le rôle de l’Église, le rôle de la foi vivante dans la vie quotidienne de la famille, est primordial et incontournable : les rassemblements d’enfants, de jeunes et de parents dans les locaux de la paroisse, la liturgie et la prière, qui leur permettront de recevoir la grâce surnaturelle et de former leur identité religieuse. Elle aidera la personne à traverser les crises et les frustrations de la vie et lui donnera une qualité de vie en communion avec le Dieu vivant.

BIBLIOGRAPHIE

Frankl V.: «Liječnik i duša», Kršćanska sadašnjost, Zagreb,1990
Kecmanović, Cerić, Marković, Loga: «Psihijatrija», Medicinska knjiga, Beograd-Zagreb,1980
Gruden, Zdenka i Vladimir: «Dijete, škola, roditelj», Zagreb,1992
Gruden, Z.: «Psihoterapijska pedagogija», Medicinska naklada, Zagreb,1992
Shulte-Tolle: «Psychiatrie», Springer Verlag, Berlin,1979
Vukasović, A: «Zov rođenih ognjišta», Kućiće br.1,1995

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Dr fr. Slavko Barbarić

LA FAMILLE DANS LES MESSAGES DE LA VIERGE MARIE REINE DE LA PAIX

Medjugorje est une école dans laquelle, Marie, Reine de la Paix, parle depuis quinze ans et demi, et, en parlant, enseigne. Dans les messages simples qu’elle donne par Maria Pavlović Lunetti (du 1er mars 1984 au 8 janvier 1987 tous les jeudis, du 25 janvier 1987 à ce jour tous les 25 du mois), elle ne dit rien de nouveau, mais nous rappelle - d’une manière simple, maternelle, pleine d’amour et de compréhension, de tendresse et de patience, mais clairement et fermement – ce que nous devons faire en tant que ses enfants, en tant qu’individus, en tant que familles et en tant qu’Église.

Son langage est simple et concret, ni théorique ni philosophique, exactement comme devrait le faire chaque mère. Marie, Reine de la Paix, est claire dans ce qu’elle demande et exige. Ses messages ne demandent pas d’explications particulières. Ils sont compréhensibles pour tout un chacun. Il n’y a pas de malentendu ni de manque de clarté en eux.

Son langage est toujours profondément lié au message biblique et à notre réalité quotidienne. Pour reconnaître plus facilement ce lien profond entre les messages de Marie, le message biblique et notre vie quotidienne, il suffit de rappeler son principal message donné le 26 juin 1981 : « Paix, paix, seulement la paix. » À ces paroles, elle ajouta les paroles prophétiques : « Priez et jeûnez, car par le jeûne et la prière vous pouvez arrêter les guerres et les catastrophes naturelles. » En 1981, la réalité de la guerre était pour nous, Croates catholiques, impensable. Cependant, dix ans plus tard, à cette même date, le 26 juin 1991, les premières bombes tombaient annonçant la terrible réalité de la guerre, guerre que nous n’avions ni voulue ni attendue, et au sujet de laquelle nous avions espéré qu’elle n’allait pas prendre les proportions qu’elle a effectivement prises.

Le principal but des apparitions est la paix. C’est comme un fil rouge qui traverse tout ce que Marie dit et fait. C’est pourquoi elle a parlé des conditions pour obtenir la paix : la conversion, la prière, le jeûne, la foi, l’abandon complet à Dieu et avancer avec Marie sur le chemin de la sainteté. Elle a clairement parlé des moyens à prendre : prier le rosaire, se confesser, lire les Écritures, aller à la messe et faire le bien.

Les personnes individuelles, les familles, les groupes, l’Église toute entière et le monde entier sont tous pareillement invités. Dans tout le processus qui conduit à la paix, Marie souligne sans cesse l’importance de chacun personnellement, de la famille et des groupes de prière. Son chemin vers la paix est inductif : tout commence par la personne qui change et qui, en changeant, crée de nouvelles relations dans sa famille, dans la société, dans l’Église et dans le monde. Tout commence par la conversion personnelle de la personne, qui crée d’abord de nouvelles relations dans la famille. Les voyants répètent inlassablement que la paix doit d’abord régner dans nos cœurs, puis dans les familles, puis dans le monde. La valeur et l’importance de chaque personne et indispensable et incontournable. Sans la personne, les programmes que Dieu a confiés à Marie sont irréalisables. La personne crée un nouveau milieu, une nouvelle famille ; une nouvelle famille crée une nouvelle Église et une nouvelle société ; la nouvelle société, la nouvelle Église et la nouvelle famille, renouvelés par le renouvellement de la personne, ont à leur tour à jouer leur rôle dans l’éducation de la personne et lui faciliter la réalisation de son identité propre.

Le but de cette présentation est de montrer ce que Marie dit à propos de la famille : quelle est la famille qu’elle désire, ce qu’elle recommande, sur quoi elle attire l’attention des parents, des enfants, des personnes âgées ; quelles sont les valeurs qu’ils doivent mettre en pratique, quelles attitudes avoir les uns avec les autres, à l’égard de Dieu, de la prière, de la messe, de l’Écriture Sainte.

Dans 27 messages, Marie mentionne la famille (dont 13 donnés les jeudis et 14 donnés le 25 du mois). Tout ce qu’elle a dit peut être présenté d’une manière chronologique ou d’une manière thématique. J’ai opté pour cette dernière.

DIEU À LA PREMIÈRE PLACE

Dieu est le fondement de tout, la source de vie et de sainteté, le Créateur et celui qui maintient tout en existence. Il est paix et amour. Sans être en contact personnel avec Lui, personne ne peut avoir la paix. Il nous donne tout ce que nous avons et tout Lui appartient. Dans une famille consacrée, Dieu est à la première place et Il doit gouverner la vie de la famille. Se décider pour Dieu et Le mettre à la première place signifie faire ce que Marie faisait et vivre comme vivait la Sainte Famille de Nazareth. Le message du 25 décembre 1991 dit : « C’est pourquoi, chers enfants, mettez Dieu à la première place dans vos familles, afin qu’il vous donne la paix et qu’il vous protège, non seulement de la guerre, mais aussi, au sein de la paix, de toute attaque satanique. » Marie parle clairement de l’action continuelle et inlassable de Satan, en temps de guerre comme en temps de paix. Il ne tolère rien de bon, « car il veut la guerre, veut le trouble, veut détruire tout ce qui est bon. » (25 mars 1993) Dans ce même message, elle nous appelle trois fois à la prière : « Priez, priez, priez. » C’est la réponse à la question de savoir comment se blottir contre son cœur maternel.

« Je suis venue vous dire que Dieu existe », tel fut l’un des premiers messages que les voyants ont transmis au monde. Plus tard, dans de nombreux messages, Marie a appelé les personnes et les familles à se décider en faveur de Dieu, à mettre Dieu à la première place.

C’est ainsi, sans doute, que Marie a vécue toute sa vie. Elle s’est désignée elle-même comme la servante du Seigneur qui a accompli en toutes choses la volonté de Dieu. Dieu était à la première place dans ses pensées, dans ses paroles, dans toutes ses œuvres.

Dans le message du 2 juin 1984, Marie nous invite à prier une neuvaine pour que l’Esprit Saint se déverse sur les familles. Elle appelle tout un chacun à faire de toute sa vie terrestre une glorification de Dieu. Dieu Lui-même procurera les dons nécessaires afin que cela se produise. St Paul enseigne dans la Première lettre aux Corinthiens : « Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, et quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu ». (1Co 10,31)

Tout ce que Marie dit, elle le dit au nom de Dieu. Elle est prophète et Reine des prophètes, or, le prophète est celui qui parle au nom de Dieu. Donc, les paroles prophétiques ne concernent pas essentiellement les événements à venir, mais parlent au nom de Dieu. C’est pourquoi, chaque mère et chaque père de famille sont en premier lieu les prophètes qui révèlent à leurs enfants la volonté de Dieu, l’amour et la miséricorde de Dieu, les plans de Dieu et les moyens par lesquels ces plans peuvent être réalisés. Dieu a confié à Marie des plans qui ne peuvent se réaliser qu’en coopération avec nous : « Vous m’avez aidée par vos prières pour la réalisation de mes plans. Continuez à prier pour que mes plans se réalisent en entier ». (27 septembre 1984) Marie nous enseigne que tout doit appartenir à Dieu, et que nous pouvons réaliser cela par ses mains. (25 octobre 1988) Lorsque nous aurons mis Dieu à la première place, nous obtiendrons la paix et nous serons protégés de toute tentation satanique. Lorsque nous aurons Dieu, nous aurons vraiment tout. Sans Lui, nous sommes misérables et perdus, nous ne savons même pas du côté de qui nous sommes. La décision en faveur de Dieu, le fait de mettre Dieu à la première place, permettra que nos vies et toutes nos actions soient entièrement et clairement déterminées. (25 décembre 1991)

La famille, dans ce cas les parents, sont ceux qui transmettent l’expérience de Dieu à leurs enfants. Lorsque Dieu est à la première place, il y aura l’amour mutuel, ils seront au service de la vie et conduiront leurs enfants sur le droit chemin. Pour cette raison, Marie nous invite à encourager les plus jeunes « à prier et à aller à la messe ». (7 mars 1985) Seulement ainsi, les enfants apprendront à vivre ce que vivent leurs parents. Lorsque les enfants découvrent Dieu, lorsqu’Il entre dans leur vie et prenne la première place, ils resteront sur le chemin de la foi, de l’amour et de la paix.

Dans le message du 25 août 1996, Marie appelle les parents à enseigner leurs enfants, car s’ils ne sont pas un modèle pour eux, les enfants perdront la foi et se trouveront dans les ténèbres, le trouble et la mort.

Marie n’oublie pas les membres âgés des familles. Ils sont importants et il faut les encourager à prier. Les jeunes, quant à eux, doivent - par leurs vies exemplaires - devenir une aide pour tous et ainsi rendre témoignage en faveur de Jésus. (24 avril 1986)

De telles relations entre les jeunes et les plus âgés, et l’importance des personnes âgées dans les familles, ne peuvent être découvertes que dans la rencontre avec Dieu. Dans le rythme de vie actuel, les enfants et les personnes plus âgées sont souvent considérés comme une gêne et un obstacle qui empêche de profiter de la vie. Ces attitudes permettent la justification de l’avortement, la suppression des tout-petits et le rejet des personnes les plus âgées, qui peut aller jusqu’à l’euthanasie. Nous pouvons nous attendre à un changement d’attitude seulement si tout le monde fait le choix de Dieu, Créateur de tout, qui donne une profonde signification à chaque vie, menacée par les attitudes matérialistes. Pour cette raison, le 25 mars 1995, la Gospa a dit que là, où il n’y a pas de prière, il n’y a pas de paix non plus, et que là, où il n’y a pas de foi, il n’y a pas d’amour non plus. La paix naît de la rencontre avec Dieu, et l’amour d’une entière confiance et de l’abandon complet à Dieu. Dieu donne la paix, et la paix est le don de Dieu. (25 janvier 1996)

Lorsque Dieu sera à la première place dans les familles, la prière trouvera sa place et son temps, et cela permettra de chercher et de trouver la volonté de Dieu.

LA PRIÈRE EN FAMILLE

L’appel le plus fréquemment adressé aux familles est de prier en famille.

Dans le message du 2 juin 1984, Notre-Dame appelle à faire une neuvaine à l’Esprit Saint, afin qu’Il se déverse sur les familles et sur toute la paroisse. Ce désir de la Gospa nous rappelle sans doute son expérience de neufs jours de prière avec les apôtres, après l’Ascension de Jésus. Et Jésus envoya l’Esprit, le Défenseur, comme Il l’avait promis. La venue de l’Esprit a rempli le cœur de Marie et les cœurs des apôtres de force et de feu de l’Esprit Saint. Par cette effusion de l’Esprit Saint, les apôtres ont été rendus capables de témoigner de ce qu’ils avaient vu et entendu. (Cf. Ac 1,13-14 et 2,1,4) Il suffit de se remémorer les dons de l’Esprit Saint : sagesse, intelligence, conseil, force, science, piété et crainte de Dieu, pour comprendre pourquoi la famille doit invoquer ensemble l’Esprit Saint, et pourquoi, spécialement aujourd’hui, nous avons besoin des dons de l’Esprit Saint. La famille est une communauté de vie dans la foi et l’amour, dans l’espérance et le respect mutuel, attentive aux besoins matériels, spirituels et psychologiques de chacun. L’homme est éduqué pour la famille et par la famille. Sans la famille, le développement normal de la personne est inimaginable. Tout peut bien s’y dérouler seulement si les cœurs sont continuellement remplis des dons de l’Esprit Saint. Nulle part ailleurs les dons d’intelligence, de conseil, de sagesse, de science, de force, de piété et de crainte de Dieu ne sont plus nécessaires.

Ce message de Marie est une réponse à tous les parents qui se demandent ce qu’ils peuvent faire de plus pour leurs familles en crise. Prier l’Esprit Saint signifie invoquer l’Esprit qui donne la vie, qui vivifie, qui transforme le vide et le désert en plénitude et en vie. (Gn 1,2) Cela signifie prier l’Esprit Saint qu’Ézéchiel a vu à l’œuvre lorsque la vie fut rendue aux ossements desséchés. (Ez 37,1-14)

Dans la mesure où l’Esprit Saint est à l’œuvre dans les familles, leurs membres seront transformés et deviendront des hommes nouveaux, et trouveront la force de vaincre leurs ténèbres par la lumière divine, de transformer l’aridité de leurs cœurs et de leurs âmes en richesse de la communion et de l’amour, de palier le manque d’amour par l’amour éternel qui est un don de l’Esprit Saint. Par la force de ce même Esprit, ils pourront guérir les blessures des cœurs causées par le manque d’amour. Dans son message du 28 mars 1985, Marie remercie tous ceux qui ont commencé à prier en famille et ceux qui se sont engagés, devenant ainsi chers à son cœur.

LA PRIÈRE DU ROSAIRE EN FAMILLE ET LE TEMPS CONSACRÉ À LA PRIÈRE

« Je demande aux familles de la paroisse de prier le rosaire en famille », a dit la Gospa le 27 septembre 1984. La prière du rosaire est une communion avec Marie et Jésus dans la joie, la douleur et la gloire. Dans cette communion, la famille grandit à l’exemple de la Sainte Famille. Chaque personne individuellement, chaque famille, chaque communauté recherche son modèle, son idéal. Lorsque l’on prie le rosaire en famille, les adultes avec les enfants, les plus âgés avec les plus jeunes, les bien-portants avec les malades, on contemple les vies exemplaires de Jésus, de Joseph et de Marie. La communion avec eux au cœur de la communion familiale concrète encourage quotidiennement les parents et les enfants à l’amour et au respect mutuel. C’est ainsi que l’on apprend en famille à vivre la joie, à porter la croix et les peines, et à faire l’expérience de la résurrection. Dans un message de novembre 1984, la Gospa dit que les familles doivent mettre la prière à la première place et ne jamais permettre que le travail et les obligations quotidiennes étouffent l’esprit de prière. Dans ce même message, elle appelle au renouveau de la prière, parce que le travail agricole avait à l’évidence étouffé la prière.

Lorsque nous prenons conscience de la situation dans nos familles en ce qui concerne la prière, nous pouvons comprendre pourquoi la Gospa souligne que nous devons mettre la prière à la première place. La prière, n’est-elle pas à la dernière place, sinon purement et simplement disparue de tant de familles ? Combien de familles ne prient que lorsque toutes les obligations quotidiennes ont été remplies, quand tout le monde est épuisé et ne peut accorder l’attention qu’à ce que la télévision offre, et qui ne demande aucun effort ? La vraie réponse à ce message serait de commencer la journée par la prière commune, ce qui est pratique, mais selon la conviction de nombreuses familles – impossible. À force de regarder la télévision tard le soir, les familles n’ont plus de temps le matin. Les activités matinales reportées, cela signifie souvent la journée perdue, et une rencontre manquée dans la matinée empêche à d’autres rencontres d’avoir lieu dans la journée.

Selon la nature la plus profonde de l’homme et de la communion familiale, rien ne serait plus naturel que la prière commune le matin et le soir.

Dans le message du 25 août 1995, Marie invite la famille à commencer la journée par la prière de louange et de la finir par la prière d’action de grâce. Le contenu de la prière du matin et du soir est donc clairement défini. Le matin, individuellement et communautairement, la famille fait le choix de Dieu et de sa sainte volonté. Elle décide, et elle prie pour cela, de rencontrer Dieu en chaque personne et de tout faire selon sa volonté. Dans la prière du matin, il faut - consciemment et avec gratitude - recevoir la nouvelle journée comme un grand don, et se mettre à la disposition de Dieu et des hommes.

Dans la prière du soir, c’est l’action de grâces qui doit s’exprimer. Tout ce que nous avons pu faire dans la journée, nous l’avons fait grâce à l’amour de Dieu. Le soir, il faut remercier, rendre grâce. L’action de grâces signifie reconnaître que les dons nous viennent de Dieu. En remerciant Dieu, l’homme lutte contre l’orgueil et contre la tentation de s’attribuer le mérite de ses œuvres. Notre reconnaissance va à Dieu et à autrui, ce qui signifie reconnaître l’œuvre de Dieu dans nos vies et dans la vie de nos familles, et prendre pleinement conscience du don que cela représente. L’action de grâces est la plus profonde expression de confiance et de foi en Dieu. Quiconque remercie Dieu, reconnaît que tout bien vient de Lui. De même, quiconque est reconnaissant, est capable de se repentir en vérité, car il pourra comprendre qu’il a dilapidé les dons de Dieu et a suivi sa propre volonté, plutôt que celle de Dieu.

La famille qui prie le matin pour la grâce de passer la journée dans l’amour, la paix, le respect mutuel et le travail bien fait, progressera spirituellement. Le progrès spirituel lui permettra de vivre toutes les vertus qui ornent une famille. De même, il est important qu’à la fin d’une journée, la famille réfléchisse ensemble aux événements de la journée, qu’elle remercie pour le bien et se repente pour le mal et le péché, et que les membres de la famille se pardonnent mutuellement les offenses ou les malentendus éventuels. C’est la condition pour que règne la paix dans la famille et pour un sommeil tranquille. Si quelqu’un, dans la famille, va se coucher sans s’être réconcilié et sans avoir pardonné, il ne trouvera pas de repos, car une âme blessée ne peut trouver de repos si elle n’est pas réconciliée avec les autres et si elle ne les a pas accueillis avec amour.

Renouveler la prière familiale signifie renouveler la rencontre avec le Père du Ciel qui nous aime infiniment dans son Fils, Jésus Christ. Sous l’emprise de l’amour du Christ à travers la prière, la famille pourra tout comprendre et tout accepter, y compris les croix et les maladies les plus lourdes. (Cf. le message du 25 janvier 1992) Les croix et les maladies engendreront la paix et la communion.

Parler avec le Père du Ciel est aussi important, sinon plus important, que de parler avec le père de famille. Une famille dont les membres ne dialoguent pas, perd ses bases et l’expression fondamentale de sa communion. Dans le message du 7 mars 1985, la Gospa appelle une nouvelle fois au renouveau de la prière.

Dans le message du 6 décembre 1984, la Gospa répète son appel à la prière en famille, et nous fait le reproche de ne pas l’avoir écoutée. Dans ce même message, elle veut que nous comprenions que tout ce qu’elle fait, elle le fait parce que Dieu l’envoie, et qu’elle nous parle en Son nom. Qui n’écoute pas son appel, n’écoute pas Dieu qui l’envoie.

Le problème de l’obéissance de la communauté paroissiale est repris dans le message du 14 février 1985. La désobéissance de la communauté paroissiale attriste le cœur de Marie : elle répète son appel adressé aux familles à l’écouter et à prier en famille. Le verbe « devoir » est rare dans les messages de Marie à Medjugorje. D’un point de vue pédagogique et méthodologique, cette expression n’empêche pas une réponse d’amour et ne met pas en question la patience de Marie, mais traduit son grand désir d’aider les familles à vivre dans une vraie communion avec Dieu.

L’AMOUR DANS LA FAMILLE

Aimer et être aimé est le désir le plus fondamental et le plus profond de chaque être humain. Il est inutile de dire à quel point l’amour et l’accueil sont importants dans l’école de vie qu’est la famille. Le manque d’amour et d’accueil au sein d’une famille provoque de profondes blessures. Il est bien connu que, dès sa conception, l’enfant ressent et sait s’il est accepté avec amour ou non. La pratique thérapeutique montre que certaines angoisses profondément ancrées, qui peuvent poursuivre une personne toute sa vie, ont souvent leur origine dans la période de la gestation, si, par exemple, le père et la mère avaient envisagé l’avortement.

C’est pourquoi, le message du 13 décembre 1984 est tellement clair. Il faut commencer à aimer en famille, puis dans la communauté paroissiale, et seulement ensuite toute l’humanité. Par ce message, Marie a voulu préparer la communauté paroissiale à l’accueil des pèlerins : « ...alors vous pourrez accepter tous ceux qui viennent ici ». (13 décembre 1984).

Encore une fois maternellement concrète, Marie demande dans le même message que la semaine suivant le message soit considérée comme un temps particulier où il faut apprendre à aimer. Il s’agit de la semaine avant Noël, qui est la fête de l’amour et de la vie. Nous commençons à pratiquer l’amour le jour où nous décidons de le vivre au cœur de nos familles. Dans le même message, Marie reprend la pensée de St Paul, selon laquelle nous ne pouvons rien faire sans amour. L’amour remplace toutes les lois, il les accomplit toutes, alors qu’aucune loi ne peut remplacer l’amour. Sans l’amour, rien n’a de valeur. L’amour donne une valeur éternelle à tout. (1Co 13,1-13) Avant le quatrième anniversaire des apparitions, le 6 juin 1985, Marie répète l’appel à aimer les membres de la maison, afin de pouvoir aimer ceux qui viennent. D’un point de vue chronologique, nous pouvons dire que Medjugorje est devenu un sanctuaire international à la fin de 1984 et, plus encore, en 1985. Le contexte des événements de Medjugorje à l’époque était le suivant : d’un côté, les pressions du régime communiste avec leurs tentatives visant à mettre une fin à tout, et de l’autre, les manœuvres très agressives contre Medjugorje en provenance de l’évêché de Mostar. Mgr Pavao Žanić, évêque de Mostar à l’époque, a publié fin octobre 1984 son pamphlet au sujet de Medjugorje. À certains moments, il semblait que les forces adverses, venant du monde et de l’Église, allaient étouffer les événements de Medjugorje. On peut néanmoins voir très clairement que Marie guidait toute chose sans se soucier et sans parler des attaques. Elle guidait et éduquait la communauté paroissiale et lui enseignait l’amour, victorieux de tout. Le jour de Noël 1991, alors que la guerre en Croatie faisait rage et que des signes avant-coureurs de la guerre en Bosnie-Herzégovine apparaissaient, Marie parlait encore d’amour et de paix : l’amour est une grâce pour laquelle il faut prier. Marie apportait Jésus, afin qu’Il bénisse tout le monde de sa bénédiction de paix et d’amour. Dans le message d’avril 1993, Marie utilise l’image de la nature qui se réveille au printemps et nous invite tous à nous ouvrir à l’amour comme la nature se réveille et s’ouvre à Dieu. Les cœurs qui s’ouvrent à l’amour, comme la nature s’ouvre, manifesteront et feront d’abord preuve de l’amour en famille. L’amour sauvera la famille du trouble et de la haine, et lui rendra l’esprit de prière. Par la prière, Dieu nous donnera la force de nous aimer les uns les autres. Marie sait à quel point il est important pour nous de comprendre cet appel à l’amour, d’être engagés dans le réveil de l’amour, c’est pourquoi elle nous redit son amour maternel. L’amour maternel est la condition nécessaire à la vie en général. Cet amour est particulièrement actif, il est la condition pour la naissance d’une nouvelle vie. Sans cet amour, la vie ne peut ni commencer ni subsister. La prise de conscience de l’amour de Dieu qui nous engendre à une nouvelle vie, et la prise de conscience de l’amour maternel de Marie, sont les conditions qui permettent à chacun de choisir l’amour, et que l’amour blessé soit guéri. En Jésus Christ, Dieu s’est révélé comme l’immense amour qui nous accueille inconditionnellement et qui est la condition de tout autre amour, surtout en famille, car Dieu s’est révélé comme Notre Père.

Dans le message du 25 janvier 1996, Marie nous enseigne que l’amour est la condition de la paix en famille : sans amour, il n’y a pas de paix.

Dans le même message, Marie parle du lien entre l’amour et le pardon. Nous sommes faibles ; nous sommes pécheurs et, à travers le péché, nous menaçons l’amour. L’amour de quelqu’un qui refuse de pardonner ne pourra pas durer, il est conditionné. Là encore, seul celui qui aime peut pardonner. Pour pouvoir comprendre avec le cœur et accueillir cet appel à l’amour et au pardon, nous devons prier avec ferveur.

LA BIBLE DANS LES FAMILLES

La Bible est la Parole de Dieu adressée à l’homme qui doit la lire, et ainsi connaître Dieu qui se révèle, ainsi que sa volonté, son amour, sa miséricorde et son pardon. Marie désire que les familles lisent la Bible et qu’elles prient. Il est important que chacun lise la Bible individuellement, et que la Bible soit lue en famille : c’est important pour la communion familiale à tous les niveaux. Qui lit la Bible en famille et médite la Parole de Dieu saura prier et témoigner ; la famille qui prie et médite ensemble sera une famille unie par la puissance de l’Esprit de Dieu.

Les voyants répètent souvent qu’il faudrait lire la Bible le matin, retenir une parole et la méditer tout au long de la journée.

Dans son message du 25 août 1996, Marie reprend la pensée au sujet de l’Écriture Sainte : nous devrions la lire et la méditer, prier et mettre en pratique, placer la Bible dans un endroit visible dans nos maisons. De cette manière, la Bible, la lettre de Dieu qui nous est adressée, nous accompagnerait à la sortie de notre domicile, quand nous allons travailler, nous invitant à ne pas oublier Dieu, et serait également la première à nous accueillir et nous saluer au retour. Si chaque membre de la famille regarde la Bible avant de quitter la maison, si la Bible est la première chose qu’il voit en rentrant, il développera de bonnes relations à l’égard de soi et d’autrui, à l’égard du travail, du temps et de l’éternité.

Ce désir de Marie nous rappelle ce que chaque membre du peuple de Dieu faisait et de ce qu’elle-même faisait sans doute. Dans le livre du Deutéronome (6,4-9), il est écrit : « Écoute , Israël : Yahvé notre Dieu est le seul Yahvé. Tu aimeras Yahvé ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton pouvoir. Que ces paroles que je te dicte aujourd’hui restent dans ton cœur ! Tu les répéteras à tes fils, tu les leur diras aussi bien assis dans ta maison que marchant sur la route, couché aussi bien que debout ; tu les attacheras à ta main comme un signe, sur ton front comme un bandeau ; tu les écriras sur les poteaux de ta maison. » Chaque membre du peuple élu de Dieu répétait cette prière quatre fois par jour et restait ainsi en permanence en contact avec la Parole de Dieu, en tant qu’individu et en tant que famille.

Souvenons-nous également des paroles de St Jérôme : « Quiconque ignore les Écritures, ignore le Christ. »

LA FAMILLE EST APPELÉE À LA SAINTETÉ ET À LA CONSÉCRATION

Tous ceux qui, par le baptême, ont été plongés dans la mort du Christ sont morts au péché et appelés à la sainteté. Dans le Credo, nous reconnaissons « L’Église, une, sainte, catholique et apostolique », qui est appelée à être sainte et immaculée. Ce qui concerne l’Église, concerne, a fortiori, tous ses membres et toutes les familles, or, la famille est souvent appelée « Église en petit ».

La sainteté est un appel à une vie concrète dans l’amour de Dieu et des frères. Cela signifie d’abord la guérison de la relation avec Dieu et avec autrui, et ensuite la croissance dans l’amour, la foi et l’espérance.

Marie désire que la famille soit le berceau de la sainteté. L’exemple de sainteté des parents et des personnes âgées sera une école de sainteté pour les jeunes. « Je vous prie d’aider par votre témoignage ceux qui ne savent pas vivre saintement... en particulier les membres de votre famille. » (25 juillet 1986) L’amour et le pardon, la bonté et la générosité, la douceur et la fermeté, l’amour de la vérité et de la modération sont l’expression de la sainteté et une école de sainteté dans les familles.

Pour que les familles puissent parvenir à la sainteté à l’exemple de Jésus et de Marie, plus précisément de l’Évangile, Marie invite chacun individuellement, les familles et les paroisses, à se consacrer à Jésus, son Fils bien-aimé, et au Cœur Immaculé de Marie. Ainsi « ...tout appartiendra à Dieu par mes mains ». (Cf. le message du 25 octobre 1988) Pour désigner la consécration, le latin utilise le mot « con-sacrare » ce qui indique la véritable signification de l’appel à la consécration. Se consacrer signifie décider de prendre Marie et Jésus pour exemple, être avec eux, vivre en leur compagnie et devenir comme eux, selon le dicton populaire : « Dis-moi qui tu fréquentes et je te dirais qui tu es. » Quiconque vit en compagnie de Marie et de Jésus à travers la prière quotidienne, en particulier la prière du rosaire, se trouve dans la meilleure école de sainteté, et comprendra comment vivre dans la joie et dans la douleur, pour la gloire finale au Ciel.

Par la consécration, une personne se met consciemment en chemin avec Marie et Jésus. Ainsi, elle peut vaincre la terrible solitude qu’engendre le péché, et créer une nouvelle communion d’amour et de vie qui triompheront sur la mort et le péché.

LES PLANS DESTRUCTEURS DE SATAN

La famille doit se sanctifier et par la sainteté se défendre contre Satan et ses actions destructrices. Il sème la haine et la division, les graines les plus dangereuses pour la famille. C’est un cancer qui détruit la cellule fondamentale de la communion humaine. Le 25 octobre 1988, la Gospa a dit : « Satan est puissant, c’est pourquoi, petits enfants, par la prière persévérante, blottissez-vous contre mon cœur de Mère. » Marie est la femme de la Bible qui, avec son Fils, est victorieuse de Satan. (Gn 3,15 et Ap 12,1-6) Mgr Milingo, exorciste, a déclaré lors d’une conversation que Marie était le premier exorciste. Avec son Fils, elle vaincra Satan. Son fils, ce n’est pas seulement Jésus, mais chacun de nous, et sa famille n’est pas seulement la famille de Nazareth, mais chaque famille. Près de son cœur maternel, chaque personne et chaque famille sont protégées des agissements destructeurs de Satan. Dans le message de 25 janvier 1994, elle révèle une fois de plus les agissements de Satan et ses intentions : « en ces temps, il veut susciter le désordre dans vos cœurs et vos familles. Petits enfants, ne lui cédez pas ! Vous ne devez pas lui permettre de vous diriger, ni vous, ni votre vie ». Son désir est de nous arracher du pouvoir de l’amour de Dieu et de gouverner nos vies, nos familles, nos sentiments et nos décisions. Là, où il prend le commandement et gouverne, il ne reste que des ruines. Une fois de plus, Marie se manifeste comme celle qui nous protège par son amour et son intercession auprès de Dieu. Tant que les personnes et les familles n’accepteront pas son amour et sa protection, la porte restera ouverte à Satan qui nous tente jusque dans les petites choses. Alors, la foi, l’espérance et la charité disparaissent. (25 mars 1995)

LA PAIX DANS LA FAMILLE

Tout ce que Marie a dit sur la famille, tous les conseils qu’elle a donnés, tous les avertissements maternels, toutes les invitations à s’abandonner à Dieu et à choisir la sainteté, les invitations à l’amour et au pardon, mènent au but final désigné par le nom qu’elle s’est donné, disant : « Je suis la Reine de la Paix ». La paix est le désir le plus profond du cœur humain. Dans tout ce que l’homme fait, de bon ou de mauvais, il recherche en quelque sorte la paix. Qu’il tue quelqu’un, mette fin à ses jours ou qu’il donne sa vie pour les autres, il recherche toujours le chemin de la paix. La paix est une valeur biblique qui se réalise seulement lorsque la plénitude de tous les biens spirituels, psychologiques et physiques se réalise.

En réalité, la paix est possible seulement lorsque la vie est acceptée, aimée, respectée et protégée. C’est pourquoi, une fois de plus, la famille est un lieu de paix – et, par conséquent, de vie, ou bien un lieu de destruction – et, par conséquent, de mort.

Marie, Reine de la Paix et Ève nouvelle, Mère des vivants, tient à la paix de la famille.

Pour cette raison, la paix est une des principales intentions de prière dans la famille, la paix particulièrement menacée en ces temps. L’appel à prier pour la paix va de pair avec l’appel au jeûne, parce que tout ce qui arrive dans la famille et dans le monde dépend précisément de la prière et du jeûne. (Cf. le message du 25 juillet 1991. À cette époque, la guerre avait déjà embrasé la Croatie.) Dieu donne la paix et défend du trouble et du mal. (25 décembre 1992)

Tandis que Dieu désire la paix, parce qu’il est la source de la paix, et qu’à travers Marie, il nous invite à la prière et au jeûne, Satan désire le trouble, la guerre, la destruction de tout ce qui est bon dans les cœurs, dans les familles, et dans le monde entier. (25 mars 1993) Le trouble et la haine peuvent être vaincus et l’amour peut s’installer uniquement par la prière. (25 avril 1993) Dans le message de Noël 1994, Marie est la Mère qui se réjouit avec nous et qui prie avec nous pour la paix, pour la paix dans nos cœurs, dans nos familles, dans nos désirs et dans le monde entier. Elle invoque la bénédiction de paix du Prince de la Paix, qui seul peut donner la paix. C’est pourquoi il faudrait finalement comprendre que la paix est un don de Dieu qui conduit à l’amour, comme l’amour conduit à la paix. (25 avril 1996)

Selon le témoignage des voyants, à chaque fin d’apparition, la Gospa dit : « Allez dans la paix, mes anges ! »

EXPRESSIONS IMAGÉES SUR LA FAMILLE

Comme son Fils, Marie utilise des images de la nature pour exprimer plus clairement ce qu’elle veut dire.

Dans le message qui précéda le Noël 1984, le 20 décembre, Marie a invité les familles à apporter une fleur à l’église et à la déposer près de la crèche, en signe d’abandon à Jésus. Dans le message du 1er mai 1996, elle a exprimé le désir que les familles soient des fleurs harmonieuses qu’elle désire offrir à Jésus, et que chaque personne soit un pétale de cette fleur dans la réalisation des plans de Dieu. Ce message a été donné au début du mois de mai, mois plein de fleurs et de beauté enchanteresse de la nature. Par cette image, Marie exprime tout ce qu’elle désire pour nos familles et pour l’unité de la famille en général.

En avril 1993, Marie nous invite à aller dans la nature pour regarder son éveil, ce qui nous aidera à ouvrir nos cœurs à Dieu le Créateur. La nature qui s’éveille du sommeil de l’hiver à une nouvelle vie est une preuve de la puissance créatrice de Dieu, une inspiration pour chaque cœur et chaque famille, conduisant à une nouvelle espérance et à l’accueil de la vie.

À travers tout ce qui vient d’être dit, on voit clairement la direction dans laquelle Marie guide la famille et le but pour lequel elle l’éduque. Sous sa protection et son intercession, par la puissance de l’Esprit de Dieu et la volonté du Père, la famille devient une communauté de vie, d’amour et de paix, un avant-goût du ciel, un rempart pour chaque personne - et surtout pour les enfants – qui les protège d’une vie sans Dieu.

Marie, Mère de la famille et Mère de l’Église ne peut trahir sa mission première : devenant Mère de Jésus, Mère de la Sainte Famille, elle devient Mère de chacun de nous et Mère de chaque famille. Par son intercession, Dieu renouvelle son « Église en petit ». Une collaboration généreuse avec Marie engendre la paix tant désirée. Ainsi soit-il !

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Mr fr. Miljenko Stojić

ACTIVITÉS DU CENTRE D’INFORMATION «MIR» MEDJUGORJE

INTRODUCTION

Le titre de cette conférence ne signifie pas que d’autres Centres de Medjugorje dans le monde entier ne méritent pas d’attention. Il veut simplement signaler que le CENTRE D’INFORMATION «MIR» MEDJUGORJE représente la voix officielle du sanctuaire de la Reine de la Paix de Medjugorje, ce qui lui donne un certain poids et une responsabilité particulière.

Les activités de ce Centre laissent apercevoir les projets poursuivis par le sanctuaire et les problèmes qu’il rencontre. Ses difficultés et ses réussites ne lui appartiennent pas pour autant en exclusivité : elles sont aussi les vôtres. De même, les difficultés et les réussites de vos associations ne vous appartiennent pas en exclusivité, elles sont également celles des collaborateurs du sanctuaire. Nous ne formons qu’une seule et même communauté, la communauté de ceux qui ont entendu la Parole de Dieu et souhaitent la diffuser. Nous vivons dans des temps qualifiés de « modernes ». L’une de ses caractéristiques fondamentales est la tendance à tout relativiser. Nous, qui nous qualifions de chrétiens, devons résister à cette tendance. Nous n’en serons pas pour autant moins « modernes » : au contraire, nous insufflerons aux temps modernes une âme. Les caractéristiques de cette âme seront la paix, la joie, l’ouverture, la douceur, et non l’affairement, l’aliénation, l’égoïsme…

Puisque nous sommes les enfants de notre temps, nous devons utiliser tous les moyens qu’il met à notre disposition. La voix de Dieu a le droit de se faire entendre par tous les moyens de communication, et de triompher de la cacophonie ambiante. Par conséquent, ne nous réfugions pas dans les abris, mais forgeons-nous une mentalité de vainqueurs !

1. BRÈVE PRÉSENTATION DES ACTIVITÉES DU CENTRE D’INFORMATIONS « MIR » MEDJUGORJE

Le Centre a démarré son activité en novembre 1993. Toute initiative de ce genre était inenvisageable avant cette date, notamment en raison de la terreur communiste et de la guerre qui a éclaté après la chute du communisme, suite à l’offensive des Serbes contre d’autres nations qui vivaient avec eux dans l’état multinational de Yougoslavie.

Les activités de ce Centre sont en développement permanent et vont de pair avec la croissance et la structuration du Sanctuaire de la Reine de la Paix. En résumée, il s’agit des archives, de la bibliothèque, du Bureau d’Information, du Bulletin de Presse et d’autres services, comme Robofax, Internet, radio, télévision, répondeur automatique 9825, publication de livres et de brochures, établissement de liens avec d’autres centres dans le monde, cours de formation pour les guides et pour les animateurs des pèlerinages à Medjugorje…

Il est possible de contacter le Centre de plusieurs manières : par e-mail (medjugorje-mir@st.tel.hr), par fax (387 88 651 444), par téléphone au Bureau d’Information (387 88 651 988), et personnellement, lors de votre séjour à Medjugorje.

2. LES MEMBRES ASSOCIÉS DE L’ASSOCIATION DE GUIDES

À l’époque où les communistes dominaient la région, n’importe qui pouvait s’adresser aux pèlerins. Après un refus initial, marqué par les arrestations de ceux qui témoignaient en faveur des apparitions de Medjugorje, les communistes ont développé une autre tactique : ils décidèrent de tirer du profit matériel des apparitions, et commencèrent à accueillir les pèlerins, qu’ils appelaient « touristes ». Dans ce but, ils ont créé une Association de Guides qui a travaillé en lien avec les agences qui amenaient les pèlerins. Pour avoir le droit d’accompagner les pèlerins, les membres de cette association devaient passer un diplôme d’état pour les guides touristiques. Leur comportement et leur langage n’ont pas toujours servi le bien des pèlerins.

Afin qu’une telle chose ne se reproduise plus, immédiatement après la chute du communisme, en 1991, nous avons fondé « l’Association des Guides pour les pèlerins dans la paroisse de Medjugorje ». Le fondateur en est la paroisse de Medjugorje. Suspendue au cours de la guerre, l’association a repris ses activités avec le retour de pèlerins en plus grand nombre.

Les conditions pour devenir un membre régulier de l’Association de Guides sont les suivantes : être catholique, avoir un comportement exemplaire, avoir suivi la formation et passé l’examen prévu à cet effet, avoir sa résidence principale en Croatie ou en Bosnie-Herzégovine, maîtriser parfaitement la langue croate et une autre langue, participer régulièrement aux rencontres mensuelles, payer la cotisation. Tout cela est précisé par les statuts de l’Association.

Hormis les membres réguliers, l’Association a des membres d’honneur. Ce sont les personnes qui, par leur travail et leurs conseils, soutiennent l’Association de Guides et l’aident continuellement de différentes manières. Bien entendu, ils ne sont pas impliqués dans l’accompagnement des pèlerins.

De nombreuses personnes amènent des pèlerins à Medjugorje et s’occupent d’eux sur place, mais ne résident ni en Croatie ni en Bosnie-Herzégovine. L’Association leur offre la possibilité de devenir « membres associés ». Les conditions pour devenir membre associé de l’Association des Guides sont les suivantes : être catholique, avoir un comportement exemplaire, participer régulièrement aux Séminaires de formation annuels, payer la cotisation, contacter le Bureau d’Information à son arrivée à Medjugorje. La connaissance de la langue croate est souhaitable, mais non obligatoire.

La création des « membres associés » de l’Association de Guides, ne signifie pas que nous n’apprécions pas à sa juste valeur le travail que vous effectuez depuis si longtemps. Nous vous remercions pour tout ce que vous avez fait jusqu’à présent pour les pèlerins. Dieu vous le rendra, nous en sommes sûrs.

Tous les collaborateurs du sanctuaire souhaitent établir les liens les plus étroits avec vous. Nous voudrions connaître vos difficultés et vos réussites et partager avec vous. Nous croyons que c’est aussi ce que vous attendez de nous. Rendez-nous donc visite au presbytère ou au Bureau d’Information. Une fois les « membres associés » de l’Association de Guides mis en place, les abus éventuels seront réduits au minimum. Il est arrivé et il arrive toujours que certains amènent des pèlerins à Medjugorje uniquement pour en tirer un profit matériel. La création des « membres associés » limitera leur champ d’action.

Les membres associés de l’Association de Guides, du fait qu’ils bénéficient d’un certain appui du sanctuaire, bénéficieront d’une plus grande crédibilité auprès des pèlerins.

Le jour approche où seuls les membres réguliers et les membres associés de l’Association de Guides seront habilités à accompagner les groupes à Medjugorje. Les autres pourront seulement amener les groupes jusqu’à Medjugorje. Cette pratique n’a rien d’extraordinaire. Elle est habituelle dans tous les sanctuaires. S’il n’y avait pas eu le communisme, et si le gouvernement actuel était stable, toutes ces choses auraient été faites depuis longtemps.

Les membres réguliers et les membres associés de l’Association des Guides auront leur carte de membre qu’ils devront porter d’une manière visible lors de leur travail auprès des pèlerins à Medjugorje. Les membres permanents porteront un vêtement distinctif, surtout lors de l’accueil et du départ des groupes, et, dans la mesure du possible, lors du séjour du groupe à Medjugorje.

3. LA PERSONNALITÉ DES MEMBRES DE L’ASSOCIATION DE GUIDES

Dans les statuts de l’Association de Guides de pèlerins de la paroisse de Medjugorje, il est spécifié qu’elle a été créée pour offrir des services et des informations aux pèlerins dans le domaine de la vie religieuse, culturelle et historique, archéologique et ethnographique. L’Association envisage également la mise en place des rencontres et des séminaires spirituels sur la foi et la vie, et d’autres activités ayant pour but la diffusion de l’amour et de la paix, quelle que soit la religion, la nationalité, le sexe et la race des personnes impliquées.

Pour résumer, le but des activités de l’Association est l’animation spirituelle des pèlerinages dans le sanctuaire de la Reine de la Paix à Medjugorje, selon les messages de Notre-Dame. Ce but détermine le profil des membres de l’Association.

Quiconque amène des pèlerins à Medjugorje ou les accompagne durant leur séjour, doit d’abord croire lui-même à l’authenticité des apparitions de Notre-Dame. Ainsi, il pourra d’autant plus facilement aider les pèlerins à y croire et à mettre en pratique les messages de la Gospa.

Un membre de l’Association de Guides ne considérera jamais les messages de la Gospa en dehors du contexte de la foi catholique. Notre-Dame n’est pas venue pour nous séparer de l’Église, mais pour que nous soyons davantage attachés à elle. Tout extrémisme ou ostracisme sont donc exclus. Un séjour à Medjugorje est un séjour dans un lieu où l’on renouvelle et approfondit la foi.

Ceux qui amènent les pèlerins à Medjugorje devraient les préparer à la rencontre avec Notre-Dame et avec le village. L’expérience que les pèlerins feront dépendra en grande partie de ceux qui les accompagnent. S’ils donnent un bon exemple, même ceux qui étaient venus en touristes rentreront chez eux en pèlerins. S’ils donnent un mauvais exemple, même ceux qui sont venus en pèlerins rentreront peut-être en touristes !

Les accompagnateurs qui veulent tout le temps voir quelque chose font une grave erreur. Ils courent d’un voyant à un autre, d’un prêtre à un autre. Leurs pèlerins n’ont pas le temps de s’arrêter pour prier, pour rencontrer Dieu. Le pèlerinage tourne alors au tourisme. Ceux qui promettent à leurs pèlerins des choses extraordinaires font également une erreur. À Medjugorje, tout le monde est bienvenu, mais tous de même manière.

Les accompagnateurs des groupes de pèlerins sont en réalité des guides spirituels. Cette notion trouve son origine dans l’Église des premiers temps. Après un long temps vécu dans la prière, certains chrétiens étaient devenus capables de montrer aux autres le chemin qui mène à Dieu. Les gens venaient vers eux pour être spirituellement renouvelés et fortifiés. Plus tard, ces chrétiens commencèrent à se réunir, et ce fut l’origine de la vie religieuse. Ceux qui accompagnent les groupes de pèlerins ne deviendront probablement pas des religieux, mais doivent néanmoins être inspirés par l’Esprit de Dieu, tel qu’il se manifeste à Medjugorje. Ils seront renouvelés personnellement et pourront renouveler le monde qui les entoure.

4. POURQUOI ENGAGER UN GUIDE LOCAL ?

Les collaborateurs du sanctuaire sont d’avis que chaque groupe de pèlerins devrait engager un guide local. Bien sûr, nous ne voulons pas écarter les membres associés de l’Association des Guides. S’ils ont les compétences requises pour s’occuper des pèlerins qu’ils amènent ici (dont le nombre est très souvent trop important), nous n’avons pas d’objections. Lorsque les groupes sont trop nombreux, les guides locaux peuvent les assister dans l’accompagnement.

Le plus grand avantage du guide local est qu’il demeure continuellement près du sanctuaire. Il est informé de ce qui se passe au sanctuaire et de tout ce qui concerne l’Association. D’autres personnes, quelle que soit l’intensité de leur fréquentation du sanctuaire, ne peuvent pas être aussi bien informées. De plus, un guide local pourra plus facilement et plus rapidement s’occuper d’innombrables petits détails qui doivent être réglés lorsque quelqu’un arrive avec un groupe de pèlerins à Medjugorje. De cette manière, ceux qui amènent les groupes à Medjugorje seront largement soulagés, et pourront eux-mêmes cheminer vers Dieu.

Vous pouvez vous adresser au Bureau d’Information du sanctuaire pour engager les guides locaux. Le sanctuaire les prépare pour ce service et, d’une certaine manière, se porte garant d’eux. Leurs honoraires sont fixés, vous pouvez vous renseigner au Bureau d’Information. Ne soyez ni surpris ni troublés. La Bible dit que tout travailleur mérite son salaire. Il est bien évident que le salaire n’est pas le souci principal des guides.

5. INTERNET

Lorsqu’on aura écrit l’histoire du passage du millénaire, il y sera très certainement question du développement rapide de l’informatique. Les ordinateurs se sont tout simplement emparés de nous. Nous les rencontrons à chaque pas.

Internet représente actuellement un des domaines les plus intéressants de la technologie informatique. Ce terme désigne un réseau d’ordinateurs dispersés dans le monde entier. Il est difficile d’évaluer le nombre d’ordinateurs qui sont actuellement connectés sur Internet. Selon les estimations, environ 50 millions de personnes utilisent actuellement Internet.

Que peut-on trouver sur Internet ? Toutes sortes de choses. On peut y trouver de quoi enrichir son âme, aussi bien que de quoi la détruire sans pitié. Bien installés dans un fauteuil, nous pouvons lire, regarder et écouter des pages et des pages entières. On peut y consulter les journaux et les encyclopédies. Pour s’en servir, il suffit de peu : un ordinateur, un modem, une ligne téléphonique et un abonnement auprès d’un organisme qui y offre l’accès. Dans un futur proche, tout cela deviendra encore plus simple. Dès cet automne, le marché propose les téléviseurs équipés d’un système permettant d’accéder à Internet et d’y effectuer des recherches.

Hormis les pages contenant les informations les plus diverses, appelées les pages Web, Internet offre le courrier électronique, appelé e-mail. En une seconde, nous pouvons recevoir et envoyer du courrier à l’autre bout du monde. Ce courrier peut contenir tout ce que l’imagination peut concevoir : caractères d’imprimerie, dessins, images, sons… Le troisième intérêt présenté par Internet, le plus récent, permet de téléphoner à l’autre bout du monde à l’aide d’un microphone et d’un ordinateur. Il suffit que la personne concernée dispose également d’un ordinateur et des programmes correspondants. Il est également possible de dialoguer avec plusieurs personnes se trouvant sur divers continents. Selon les dernières nouvelles, il est déjà possible d’entrer en contact avec n’importe quel poste de téléphone, n’importe où dans le monde. Ce serait un pas de géant en direction de la mise en lien des personnes du monde entier, puisque les communications téléphoniques via Internet sont extrêmement peu coûteuses.

Dans notre Centre, nous sommes connectés au réseau Internet depuis février 1995. Étant les premiers de la région à faire ce pas, nous avons été confrontés à bon nombre de difficultés et de maladresses, mais aujourd’hui tout fonctionne plus ou moins bien.

Le contenu des pages que nous proposons actuellement est disponible en sept langues : croate, anglais, français, allemand, italien, espagnol et polonais. Il suffit de cliquer sur la page de présentation, et tout le contenu apparaîtra dans l’une des sept langues proposées.

Les pages que nous proposons sont divisées en plusieurs rubriques. La première est appelée Faits de Base. Elle contient les informations principales qui concernent le sanctuaire et ce qui s’y passe. Sous la rubrique Messages de la Sainte Vierge, vous trouverez le dernier message de la Gospa, tous les messages et les interprétations des messages. Le commentaire du dernier message change tous les 29 du mois. Il est rédigé par un des prêtres qui travaillent à Medjugorje. La rubrique Témoignages est un espace où chaque personne peut partager ses expériences de Medjugorje. La rubrique Documents présente un recueil de déclarations, de conférences, de documents officiels concernant les événements de Medjugorje. Le Bulletin de Presse est la voix officielle du sanctuaire. Vous trouverez sur Internet le dernier numéro de ce bulletin qui paraît un mercredi sur deux, tous les numéros précédents et un bref historique de cette publication. Beaucoup de personnes se sont rendues à Medjugorje et plus nombreuses encore sont celles qui aimeraient venir. La rubrique Medjugorje et sa Région donne les principales caractéristiques de Medjugorje et du peuple qui y habite. La rubrique Annonces est conçue comme un panneau d’affichage. Elle est constamment mise à jour. Nous sommes bien conscients que de nombreux livres ou articles ont été écrits et qu’il est impossible de les connaître tous. Mais, vous pouvez avoir un aperçu de ceux que nous avons rassemblés sous la rubrique appelée Littérature. Nous ne sommes pas les seuls à publier les informations sur Medjugorje sur Internet, il y en a d’autres dans le monde. Nous publions leurs adresses dans la rubrique Adresses Web. Afin que vous ayez une meilleure idée de l’endroit où vous voulez vous rendre, nous publions quelques images dans la section Cartes géographiques et photos. Les textes de toutes les conférences proposées au cours de ce séminaire et des séminaires précédents sont présentés dans la rubrique Séminaires de prière et de formation.

La préparation et la gestion des pages Web est un travail très exigeant et demande beaucoup de temps. Je ne sais pas si vous êtes satisfaits de la présentation actuelle. Pour nous, le plus important n’est pas de leur donner une apparence hors du commun, mais de donner accès à autant d’informations que possible sur Medjugorje. Par conséquent, la présentation est secondaire.

Internet en tant que moyen de communication représente l’avenir. Il ne faut pas en avoir peur. À l’heure actuelle, il fait penser à une mégalopole dans laquelle on peut trouver des lieux de prière, tout comme des lieux où se livrer à tous les vices possibles. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas y vivre et tenter de l’influencer. Certains efforts ont déjà porté leurs fruits, et certaines règles commencent à y être appliquées.

6. COMMUNICATION

Nous vivons dans un temps qui nous propose différents moyens de communication. Ils se sont développés au cours des 150 dernières années. En tant que chrétiens, nous devons répondre aux défis qu’ils nous lancent.

Les moyens de communication sociale créent l’opinion publique. C’est pourquoi il est tellement important de savoir qui les manipule et avec quelles intentions. Il faut une grande maturité pour comprendre cela, mais n’est-ce pas vers quoi nous tendons dans notre vie spirituelle ?

Il est temps de nous impliquer dans un « apostolat des moyens de communication ». Laisser ce soin à n’importe qui serait un grave manque de sérieux de notre part. Le Malin essaye de nous éloigner des médias afin d’être le seul à avoir le droit à la parole. C’est pour cette raison que les programmes actuels multiplient les séquences violentes et négatives, et tournent l’amour véritable en dérision. Nous devons tout mettre en œuvre pour changer cela.

Il nous est difficile de vérifier le succès de notre travail. Il est impossible de savoir combien de personnes nous ont entendus, combien d’entre elles ont reçu la lumière à travers nous, combien se sont détournés du péché à cause de nous... Nous ne le saurons qu’à la fin de notre vie, lorsque nous nous présenterons devant le Seigneur.

Les caractéristiques des temps dans lesquels nous vivons sont la sécularisation et le sécularisme. Nous pourrions accepter la sécularisation, mais en aucun cas le sécularisme, car il nous prive du droit à exprimer notre foi. Tout en vivant dans un tel monde, souvenons-nous du commandement de Jésus : d’aller dans le monde entier pour annoncer l’Évangile à toute la création. Les moyens de communication sont les bienvenus pour y parvenir.

CONCLUSION

Nous sommes réunis ici à cause des événements qui se sont produits dans la paroisse de Medjugorje. S’ils n’avaient pas eu lieu, aucun d’entre nous ne serait assis ici aujourd’hui. Tous, nous croyons que ces événements sont en train de changer le monde et de lui apporter le véritable esprit, l’Esprit de Jésus Christ. C’est pourquoi, nous devons nous efforcer de répercuter ces événements dans les média.

Nous ne devons pas fonder notre travail sur des événements sensationnels, mais sur la prière. À Medjugorje, Marie n’offre rien de sensationnel. Ici, elle nous apprend à prier. Sachant cela, nous ne devons pas craindre pour la réussite de notre travail. La prière va beaucoup plus loin que tous les moyens de communication. Néanmoins, si nous disposons de moyens qui nous permettent de répandre la prière et notre pensée auprès d’un grand nombre de personnes en très peu de temps, il ne serait pas raisonnable de ne pas s’en servir. Bien sûr, en faisant cela, nous ne devons pas avoir une attitude agressive. Seul celui qui n’est pas sûr de ce qu’il offre est agressif. Soyons prudents, déterminés et dignes.

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René Laurentin

LA PLACE DE MEDJUGORJE DANS L’ÉGLISE

La place de Medjugorje dans l’Église est un sujet difficile, contesté, objet de confusion et ambiguïtés qu’il importe de dissiper. Medjugorje se passe d’explications parmi nous. C’est un lieu de grâce où la Vierge s’est manifestée par des fruits tout à fait exceptionnels : vie spirituelle, conversions, guérisons. « On juge l’arbre à ses fruits », dit le Seigneur, et c’est le seul critère de discernement qui vienne de Lui. (Mt 7,20 ; 12,33)

LE STATUT DES APPARITIONS

Reste pourtant une ambiguïté dont il vaut mieux prendre conscience. Les apparitions, où la foi devient évidence, où l’invisible devient visible, sont un phénomène superficiel et secondaire par rapport à l’évangile et aux sacrements. Là même où l’Église reconnaît une apparition, (y compris Lourdes et Fatima, les plus solennellement reconnues), elles n’engagent pas son infaillibilité ni même son autorité, car il ne s’agit pas d’un dogme, nécessaire au Salut, enseigné au nom du Christ, mais d’un discernement, seulement probable et conjectural. Elle ne dit pas : « Vous devez y croire », mais : « Il y a de bonnes raisons d’y croire. Il est bienfaisant d’y croire. »

L’autorité responsable peut même ajouter : j’y crois ; mais elle n’impose pas ce jugement sous peine de péché. Si je ne croyais pas à Lourdes ou à Fatima, je n’aurais pas à m’en accuser en confession, si je trouvais des raisons de douter. Et c’est dans cet esprit que j’avais entrepris mon enquête sur Lourdes, en toute ouverture d’esprit.

Pareillement, si l’autorité dit : « Il y a de sérieuses raisons de ne pas y croire, il est malfaisant d’y croire », le jugement appelle une obéissance à l’Église, mais laisse une liberté d’examen et de discernement. Lorsque Mgr Žanić avait annoncé son jugement négatif en 1984-1985, j’avais préparé ma conscience à cette éventualité et je m’en étais expliqué loyalement, en disant, en résumé : « En ce cas, je cesserai d’écrire ou de parler publiquement sur Medjugorje, mais comme les amis de Sainte Jeanne D’arc, brûlée par ordre d’un évêque en 1431, j’approfondirais et déposerais en bonne place les raisons de réviser un tel jugement. »

Le respect de l’autorité et l’obéissance dont il ne faut jamais se départir, comportent donc des nuances, parfois délicates, dans ce domaine qui est celui du libre service de la foi.

LES DEUX SENS DU MOT ÉGLISE

Quant au mot « Église », le dernier mot du programme qui m’est imparti (la place de Medjugorje dans l’Église), une autre ambiguïté doit être dissipée :

  • Avant le Concile, pour la plupart des théologiens, l’Église c’était la hiérarchie : le Pape et les évêques.
  • Le Concile Vatican II a révisé cette conception. Il a restructuré inversement la Constitution sur l’Église : l’Église c’est d’abord le peuple de Dieu, à l’intérieur duquel certains fidèles (égaux aux autres devant Dieu dans la foi, l’espérance, la charité et la quête de sainteté) ont l’autorité au nom du Christ, mais cette autorité est service du peuple de Dieu, ce pour quoi le Pape s’honore du titre « Serviteur des serviteurs de Dieu ».

Examinons donc la place de Medjugorje dans l’Église selon ces deux sens complémentaires du mot Église qui signifie une réalité organique : le Corps mystique mais visible du Christ.

1. L’accueil du peuple de Dieu

À Medjugorje, comme ailleurs, c’est le sens des fidèles qui a, en premier lieu, discerné la présence de la Vierge dans ces apparitions.

Le curé, Jozo Zovko, un spirituel, fut d’abord critique, exigeant dans la vérification. Il disait aux paroissiens : « Qu’allez-vous faire sur cette colline, alors que vous avez l’Eucharistie à l’église ? »

Il les a tous ramenés à l’église pour la messe quotidienne où se transférèrent les apparitions. Assez vite, il a cru, et une apparition personnelle de la Vierge a confirmé sa conviction.

Dans le peuple chrétien cependant, il y a des opposants, à droite et à gauche.

1. Les chrétiens progressistes privilégient la critique négative, les explications psychologiques et psychanalytiques, le doute systématique et le soupçon devant les phénomènes extraordinaires.

2. L’aile traditionaliste ou intégriste moyenne, par ex : Fidelity aux USA, ou l’extrême droite de la Contre Réforme catholique (qui excommunie le Pape comme hérétique) ont été les plus farouches adversaires de Medjugorje.

Des pèlerins demandent souvent aux voyants :

- « Que faire pour convaincre les opposants ? »

Vicka répond :

- « Priez pour eux et soyez bons. Le Seigneur et la Sainte Vierge feront le reste. »

C’était déjà la position de Bernadette qui ne discutait pas les objections des opposants venus polémiquer avec elle, mais répondait, s’ils insistaient, de son écoute silencieuse :

- « Je suis chargée de vous le dire, je ne suis pas chargée de vous le faire croire. »

2. L’église hiérarchique : les évêques et le Pape

La situation est plus complexe du côté des autorités.
L’évêque du lieu

L’évêque du lieu, successeur des apôtres, responsable du discernement dans son diocèse, Mgr Žanić, avait d’abord été favorable (quoiqu’il ne veuille plus s’en souvenir aujourd’hui) durant l’été 1981. Mais le conflit local avec les Franciscains (qui sont 80 % des prêtres de son diocèse) a tout envenimé de proche en proche. Le temps qui m’est imparti ne me permet pas de détailler ce problème, pour lequel je renvoie à mes livres.

Lorsque je me suis rendu pour la première fois à Medjugorje, à Noël 1983, je le croyais encore favorable. Il m’a détrompé, j’ai écouté et recueilli de mon mieux ses objections, mais elles m’ont paru assez extérieures, partiales et faibles à l’égard des évidences positives, ce qui m’a engagé dans une aventure difficile, en tout respect de son autorité épiscopale. Je l’ai vu aussi souvent que j’ai pu. Il me confirmait son opposition radicale. Au terme de sa visite, je lui demandais sa bénédiction. Une fois, cela a fait difficulté. J’ai insisté en disant :

- « Si je vous pose problème, donnez-la pour ma conversion. »

À quoi il a répondu avec sa grandeur épiscopale :

- « Restez Laurentin. »

Sa position du 30 octobre 1984 contre Medjugorje m’a calomnié sur plusieurs points, de manière surprenante. Je lui aurais conseillé de cacher la vérité. Je m’étais disqualifié comme théologien. Je faisais cela pour de l’argent. J’avais gagné plus d’un milliard ! J’avais succombé au charme des voyantes de Medjugorje plutôt que d’écouter l’évêque. Mais il ne m’a jamais défendu d’aller à Medjugorje, ni interdit d’écrire.

Je m’apprêtais à faire silence après le jugement négatif qu’il avait publiquement annoncé. Mais lorsqu’il vint le proposer à Rome, en avril 1986, le Cardinal Ratzinger lui dit (et Mgr. Žanić, homme clair et sans dissimulation, l’a révélé ouvertement) :

- « Non, vous allez dissoudre votre commission diocésaine. Le jugement est transféré à la Conférence épiscopale. »

C’était inespéré, car selon une vieille tradition radicalisée par le Cardinal Ottaviani, qui avait pris en 1959 et 1960 les décrets contre Sœur Faustine (aujourd’hui béatifiée) et contre Mère Yvonne Aimée, etc... le Saint Office soutenait généralement les évêques défavorables aux apparitions, et modérait plutôt les jugements favorables. Ici, c’était donc l’inverse. On s’est demandé pourquoi.

Je crois tenir l’explication.

En juillet 1984, le Pape Jean-Paul II, à qui j’avais offert en mains propres mon premier livre : La Vierge apparaît-elle à Medjugorje ? (février 1984), l’avait lu à Castelgandolfo, et l’avait recommandé à Mgr Pio Belo Ricardo, évêque de Los Teques (Venezuela).

L’année suivante, il avait lu pareillement les études médicales et scientifiques sur Medjugorje que j’avais écrit avec le Professeur Joyeux de Montpellier.

Enfin, j’avais suscité à Milan, une réunion internationale de médecins et théologiens, pour établir 10 conclusions scientifiques et 10 conclusions théologiques sur Medjugorje. L’accord avait été facile, en une journée de travail, et ces 20 conclusions furent envoyées à Jean-Paul II par le Docteur Luigi Farina, Président de l’ARPA chez qui s’était tenue cette réunion. Le Pape transmit tous ces documents au Cardinal Ratzinger, Préfet de la Congrégation de la Foi qui semble avoir pris cette décision neuve après avoir conféré avec Jean-Paul II. Une décision sans précédents : Elle dessaisissait l’évêque de son autorité ordinaire, sans le dessaisir complètement, puisqu’il fait partie de la Conférence épiscopale à laquelle le jugement fut transféré.

Il en résultat un long parcours. Le Cardinal Kuharić, chez qui Vicka avait eu une apparition (dans son salon, en 1983, m’a-t-il dit) était ouvert et discrètement favorable, m’a-t-il semblé. En tout cas, il souhaitait que les évêques assument en paix ce pèlerinage majeur et fructueux, au lieu de nouer un de ces conflits d’apparitions qui créent malaises et divisions dans l’Église, au détriment des fidèles, des évêques, et de Dieu même.

Mais prudent et respectueux de l’évêque du lieu : Mgr Žanić, responsable devant Dieu de la paroisse de Medjugorje, il lui gardait, à juste titre, une position de premier plan.

Chaque fois que la question fut posée à la Conférence épiscopale, il lui revenait de parler en premier. Il renouvelait, avec la vigueur qui lui est propre, toutes les objections qu’il avait développées par deux fois de manière publique et retentissante :

1. Position du 30 octobre 1984, qui avait porté un coup d’arrêt à l’expansion de Medjugorje, puisqu’il invitait les évêques des Conférences épiscopales du monde entier à soutenir sa position négative, en suggérant que les pèlerinages (officiels, précisait-il toutefois) n’étaient pas autorisés...

2. Puis son sermon sévère du 25 juillet 1987, contre Medjugorje, durant la cérémonie de Confirmation. Il s’attendait à voir les paroissiens s’insurger. Mais ils l’écoutèrent avec respect, silencieusement, malgré les profondes blessures qu’il ressentaient en leur cœur. Ils donnaient la preuve de leur héroïque respect et de leur obéissance, mais l’évêque le comprit d’abord autrement. Durant le déjeuner qui suivit, il conclut : « Ils n’y croient plus tellement aujourd’hui ». Les franciscains le détrompèrent (sermon publié avec mes observations critiques dans DN 7 p.72-77).

Après cette intervention prioritaire de l’évêque du lieu, les autres évêques, moins informés, se taisaient ou l’appuyaient par solidarité. Le seul qui plaidait pour Medjugorje était Mgr Franić, archevêque de Split, autorité en ces matières puisqu’il était président de la Commission doctrinale. Mais il prit sa retraite le 10 septembre 1988 et se retira de la Conférence épiscopale où le terrain était libre pour Mgr Žanić.

En ces conditions, je n’ai jamais su comment le Cardinal Kuharić avait pu faire pour aboutir, en novembre 1990, à la reconnaissance du pèlerinage et de son culte par la Conférence épiscopale. Il se faisait selon les directives et critères publiés le 25 février 1978 par le Cardinal Šeper (prédécesseur du Cardinal Ratzinger à la Congrégation de la Foi. En cas d’apparitions - si nulle objection grave ne se présente et si les fruits sont bons, que l’évêque prenne en charge le pèlerinage pour diriger la piété des fidèles. Après quoi, il pourra, éventuellement, avec la lenteur et l’exigence nécessaire, reconnaître les apparitions elles-mêmes. Malheureusement, Mgr Žanić n’avait accepté cette reconnaissance du pèlerinage (auquel il était opposé) qu’en y introduisant diverses clauses négatives. Ces menues restrictions rendaient le texte tellement obscur que le Cardinal et la Conférence avaient décidé de ne pas le publier et de faire la reconnaissance en acte (comme on a fait à Rome sans déclaration, pour la reconnaissance de Tre Fontane).

C’est ainsi que Mgr Komarica, Président de la Commission d’enquête sur Medjugorje, vint célébrer la messe du pèlerinage et déclara officiellement :

« Je viens non seulement en mon nom, mais au nom de tous les évêques yougoslaves, y compris Mgr Žanić (évêque du lieu et opposant numéro 1). D’autres évêques viendront... »

Et d’autres suivirent, y compris Mgr Žanić, et son archevêque, le futur Cardinal Puljić de Sarajevo.

Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais le 2 janvier 1991, le texte, gardé secret du fait de son ambiguïté, fut publié par l’Agence de presse italienne Asca (sur l’initiative de Mgr Žanić, assure la Contre Réforme qui lui en fait gloire) avec un commentaire radicalement négatif. Ce texte obscur publié dans des conditions sauvages créa incertitude et désarroi, à l’échelle internationale, chez les pèlerins. Ils en référèrent au Cardinal Kuharić qui répondit :

- « L’église ne se presse pas. Nous les évêques, après 3 années d’études de la Commission, nous avons déclaré Medjugorje lieu de prière et sanctuaire marial. Cela signifie que NOUS NE SOMMES PAS OPPOSÉS à ce qu’on vienne en pèlerinage à Medjugorje pour y vénérer la Mère de Dieu, en conformité avec l’enseignement et la foi de toute l’Église. »

Pour ce qui est de la supernaturalité des apparitions, nous avons déclaré : JUSQU’À PRÉSENT NOUS NE POUVONS L’AFFIRMER. NOUS REMETTONS CELA À UNE DATE ULTÉRIEURE. L’ÉGLISE N’EST PAS PRESSÉE. «(Déclaration imprimée dans Večernji List, août 1993 ; DN 13, p.41)

Plusieurs évêques Croates parlèrent dans le même sens.

Accablé de questions, à l’échelle internationale, le Cardinal Kuharić prit le temps nécessaire pour faire aboutir, le 10 avril 1991, une nouvelle rédaction du texte, plus claire d’où avaient disparu quelques ambiguïtés négatives.

Le sens devenait plus clair, malgré les déclarations négatives répandues dans la presse. Les évêques yougoslaves avaient à choisir entre les deux formules classiques de jugements possibles, tant que l’authenticité des apparitions n’est pas reconnue :

1. Non patet supernaturalitas : Le surnaturel n’est pas prouvé.

2. Patet non supernaturalitas : Le caractère non surnaturel est prouvé.

Les évêques avaient choisi, non la seconde formule, qui exclut le surnaturel, mais la première, dubitative : il n’est pas encore possible de reconnaître le caractère surnaturel, mais sans l’exclure, comme l’avait clairement précisé le Cardinal Kuharić. Il est dommage de voir comment la presse et comment certains prêtres ou autorités confondent constamment la formule prudente qui suspend le jugement, et la formule qui l’exclut définitivement. Cette confusion, fréquente en la matière n’a cessé de rebondir à Medjugorje.

Autre ambiguïté : le mot surnaturel, en pareille circonstance est généralement employé en un sens ambigu et sujet à confusion ; il veut signifier miraculeux, extraordinaire, inexplicable : ce qui est un sens tout à fait particulier du mot surnaturel. Et l’ambiguïté est malheureuse, car elle semblerait priver les actes du pèlerinage (messes ferventes, confessions innombrables, chemin de Croix et chapelets) du caractère surnaturel, comme si c’était un lieu de superstition ! Ainsi vont certains commentaires. Mais la Conférence épiscopale ne met pas en doute le caractère surnaturel des liturgies de Medjugorje, mais estime seulement que la preuve d’une intervention extraordinaire de Dieu n’est pas encore établie.

Vous savez que Mgr Franić a blâmé la prudence des évêques et la tient en partie responsable de la guerre, dans la mesure où « Ils n’ont pas reconnu la voix de la Mère de Dieu qui proposait la paix » ou se sont « opposés sans relâche » (DN 14, p.114). L’appel urgent de la Vierge n’ayant pas été assez entendu, elle n’a pu sauver la situation. Je laisse à l’archevêque la responsabilité de son jugement publié par Gebetsakion, n’ayant personnellement pour cela ni autorité, ni compétence. (DN 13,14 et 15 : 1994, 1995, 1996).

Pendant la guerre qui mettait son diocèse à feu et à sang, Mgr Žanić s’était réfugié à Rome où il passa un long temps pour faire nommer un successeur qui continue sa lutte contre les franciscains et Medjugorje. Il l’obtint. L’abbé Perić, supérieur du séminaire croate à Rome, qui avait été son aide principal pour transmettre ses objections et griefs aux congrégations romaines, est donc devenu évêque du lieu, avec des convictions moins tranchées, mais moins impulsives, donc plus efficaces que Mgr Žanić. Certes, il garde la prudence épiscopale et n’a posé aucun jugement officiel négatif contre le pèlerinage, malgré bien des déclarations et actes défavorables.

Mais à plusieurs reprises, il a interprété le jugement de la Conférence épiscopale (ci-dessus) de manière assez radicalement négative. Il l’a fait dire par son vicaire général, puis s’est exprimé lui-même dans « Crkva na Kamenu » (Église sur le roc, début 1995) en ces termes radicaux :

« Il est impossible de déclarer qu’il s’agit d’apparitions surnaturelles (à Medjugorje). Depuis la déclaration (épiscopale du 10 Avril 1991) il y a l’avis (négatif) de deux évêques de Mostar : le précédent et l’actuel (Mgr Perić parle ici de lui-même à la troisième personne). Ceux qui disent le contraire racontent de naïves histoires d’enfants(...). Nous en restons à l’évidence que la Sainte Vierge n’est apparue à personne à Medjugorje. »

Il ajoute toutefois (ce qui limite et contredit même son propos) :

- L’ordinaire de Mostar (Mgr Perić lui-même) n’admet que ce qu’ont dit les évêques (le 10 avril 1991) et ne croit pas aux histoires de Medjugorje. C’est ce que le Vicaire général a clairement mis en avant (dans une déclaration récente à la presse). Le texte même de la déclaration du 10 avril et l’interprétation autorisée du Cardinal Kuharić, principal auteur et signataire de la Déclaration épiscopale, citée plus haut, remettent les pendules à l’heure.

Le jeu de bascule des interprétations

Dans cette confusion, plusieurs évêques du monde entier, n’y comprenant rien se demandaient s’ils devaient décourager leurs diocésains d’aller à Medjugorje. Ils écrivirent à la Congrégation de la Foi et plusieurs reçurent une réponse qui faisait écho à la décision officielle des évêques en date du 10 avril 1991, mais en des termes si ambigus que la presse l’interprétait en un sens radicalement négatif. À la suite de cette publication, beaucoup de fidèles se sont entendu dire : « Si vous allez à Medjugorje, vous êtes dans la désobéissance ».

Voici l’essentiel de la réponse adressée à Mgr Taverdet, évêque de Langres, en réponse à sa lettre du 14 février 1996, par Mgr Tarcisio Bertone, secrétaire de la Congrégation de la Foi le 23 mars 1996. Après avoir cité l’essentiel de la déclaration des évêques yougoslaves en date du 10 avril 1991 (reproduite plus haut), il conclut : « De ce qui vient d’être dit, il ressort que les pèlerinages officiels à Medjugorje entendus comme lieu d’authentiques apparitions mariales, ne doivent pas être organisés, parce qu’ils seraient en contradiction avec ce qui est affirmé par les évêques de l’ex-Yougoslavie. »

Sous l’influence des deux rapports successifs des deux évêques du lieu, la réponse accumule tous les traits négatifs sans faire ressortir le positif du document. La presse titra : Rome interdit les pèlerinages à Medjugorje.

L’évêque de Rottenburg-Stuggart avait fait écho à la même déclaration reçue de Rome, en des termes plus négatifs qui avaient été reproduits par l’évêque de Metz. Sœur Emmanuel lui écrivit en observant à juste titre :

Le Cardinal Ratzinger n’a jamais interdit le pèlerinage à Medjugorje. Il ne fait que rappeler une loi d’Église, à savoir que, pour les lieux d’apparitions encore à l’étude, les pèlerinages officiels sont interdits mais les pèlerinages privés sont autorisés. (Lettre du 8 novembre 1995)

Vu la confusion qui résultait de ces interprétations contradictoires et plus ou moins abusives, le docteur Joaquin Navarro Valls, porte-parole du Saint-Siège et directeur de la salle de presse, démentit clairement l’interprétation négative, le 21 août 1996 :

- « Le Vatican n’a jamais dit aux catholiques "Vous ne pouvez pas aller à Medjugorje." Aux évêques, il a dit, au contraire : "Vos paroisses et diocèses ne peuvent (encore) organiser des pèlerinages OFFICIELS." Mais on ne peut dire aux gens de ne pas y aller, tant qu’il n’est pas prouvé que les apparitions sont fausses : ce qui n’a jamais été déclaré. »

Donc chacun peut y aller s’il veut (Déclaration du 21 août 1996 à l’Agence d’information catholique, Catholique News Service).

Il a ajouté :

« Un catholique qui va en un tel lieu (d’apparitions) de bonne foi a droit à une assistance spirituelle. L’Église n’interdit donc point aux prêtres d’accompagner les voyages à Medjugorje en Bosnie-Herzégovine, organisés par des laïcs comme elle ne leur interdit pas d’accompagner un groupe de catholiques qui iraient visiter la République Sud-Africaine (...) Celui qui lit la lettre de l’archevêque Bertone pourrait penser qu’il serait désormais interdit aux catholiques d’aller à Medjugorje. Ce serait mal l’interpréter, car rien n’a changé, rien de nouveau n’a été dit. Le problème est de ne pas organiser des pèlerinages officiels (évêques en tête) qui semblerait constituer une reconnaissance canonique des événements de Medjugorje encore en examen. Tout autre chose est d’organiser un pèlerinage accompagné par un prêtre, nécessaire pour les confessions. C’est dommage que les paroles de l’archevêque Bertone aient été comprises en un sens restrictif. L’Église et le Vatican auraient-ils dit non à Medjugorje ? Non !

Le directeur de la salle de presse a soigneusement noté que l’archevêque Bertone avait bien fait écho à la déclaration épiscopale là où elle dit que « les nombreux fidèles qui se rendent à Medjugorje requièrent l’aide pastorale de l’église » (donc l’aide de prêtres dans leurs pèlerinages).

Ainsi les pèlerinages à Medjugorje quoique non officiels, requièrent-ils l’aide pastorale de prêtres pour la messe, la prédication, les confessions.

Les autres évêques

Faute de place, je serai bref sur la position du nouvel évêque dont j’ai détaillé les actes et déclarations dans les volumes successifs des Dernières nouvelles de Medjugorje (DN 13,14,15 : 1994, 1995, 1996). Plus de 100 évêques sont venus à Medjugorje, malgré l’opposition de l’évêque du lieu : c’est assez étonnant, vu la manière stricte dont la solidarité épiscopale est vécue dans l’Église (ce qui a beaucoup nui à ma réputation ; car les attaques personnelles de Mgr Žanić contre moi ont été prises au sérieux).

Mais nombre d’évêques ont constaté les conversions remarquables, profondes, durables, de leurs diocésains à Medjugorje. Des indifférents, des opposants, des protestants devenaient des piliers de l’église catholique. Ils sont allés voir, ils ont été convaincus et ils ont témoigné, selon la liberté statutaire établie dans l’église en la matière. J’ai détaillé le nom et les témoignages de ces évêques dans les derniers volumes de mes Dernières Nouvelles.

La position du Pape

Si tant d’évêques se sont rendus à Medjugorje, malgré la dissuasion que créait la position négative de l’évêque du lieu (connue pourtant de certains d’entre eux), cela tient à une autre raison que plusieurs d’entre eux ont publiée. Ils ont demandé conseil à Jean-Paul II qui leur a répondu positivement, jusqu’à dire à Mgr Hnilica :

- « Si je n’étais pas Pape, il y a longtemps que j’y serais allé. »

Je ne peux détailler les nombreux témoignages épiscopaux sur la position du Pape. Je serai encore plus discret sur le fait qu’ayant été invité à un petit déjeuner avec lui, pour lui soumettre une question importante, lorsque j’eus terminé, il passa la moitié de ce petit déjeuner à m’interroger sur Medjugorje.

Ce qu’il a le plus souvent reconnu devant de nombreux évêques, ce sont « les bons fruits » qui sont le fondement de l’authenticité d’une apparition, selon le seul critère donné par le Christ lui-même : « On juge l’arbre à ses fruits. » (Mt 7,16-20 ; 12,33 et parallèles).

Le 6 avril 1995, le Vice-président de la Croatie, M. Radić, représentant le Président Tudjman, et le Cardinal Kuharić, venus remercier le Pape après sa visite en Croatie, l’invitèrent à venir célébrer le 17ème centenaire de la fondation de l’Église de Split en septembre 1995. Le Pape répondit :

- « J’examinerai. Mais en ce cas (si je puis venir) je souhaite visiter Santa Maria Bistrica (le sanctuaire national croate de la Vierge, proche de Zagreb) et... Medjugorje. »

Ces paroles furent rapportées par les journaux croates (DN14,p.44)...

Le 31 mai 1995, selon sœur Emmanuel, il dit à un groupe d’anglais :

- « Priez pour que je puisse aller cette année à Medjugorje (DN 15).

Ce témoignage et d’autres sont publiés dans DN 14, p.43-45 et 15, p.43-46.

Je ne pense pas que le désir du pape puisse se réaliser, vu l’opposition de l’évêque du lieu, car si le Pape a théoriquement tout pouvoir, il manifeste le plus grand respect aux autorités établies dans l’église, selon le principe de subsidiarité : Que l’échelon supérieur doit éviter de se substituer aux échelons inférieurs tout en gardant sa liberté de confirmer, en privé, ses convictions.

OÙ VA-T-ON ?

A la question : « Où va-t-on ? », que répondre ?

Medjugorje ne relève plus de la Conférence épiscopale yougoslave, présidée par le Cardinal Kuharić, qui avait assumé le pèlerinage. Mais il n’y a plus de Conférence épiscopale yougoslave et sa Commission a disparu de ce fait.

L’évêque du lieu, Mgr Perić appartient maintenant à la Conférence épiscopale de Bosnie-Herzégovine, présidée par le Cardinal Puljić. Celui-ci a toujours été solidaire de l’évêque du lieu qui est opposé, sans prendre formellement position. La nouvelle Conférence de Bosnie-Herzégovine ne comprend que trois évêques, l’un radicalement négatif (l’évêque du lieu), l’autre (le Cardinal président), normalement solidaire. La position du troisième Mgr Komarica, l’évêque persécuté de Banja Luka, président de la Commission d’enquête yougoslave, reste sibylline. Dans la Commission qu’il présidait, les experts favorables à Medjugorje ne se sentaient pas libres, ont confié certains d’entre eux à Mgr Franić.

L’évêque de Mostar aurait dit en privé à des interlocuteurs qui l’ont rapporté :

« Durant la guerre, je n’agirai pas contre Medjugorje, mais après la guerre, ce sera sans doute le moment. »

Ce qui suspend son action négative feutrée, c’est qu’il n’ignore pas la position du Pape, discrète mais claire et bien connue. La situation de Medjugorje restera protégée moralement, tant que Jean-Paul II vivra.

Ce qui se passera après (le plus tard possible !) dépendra du prochain Pape.

À vues humaines, la perspective paraît donc assez sombre. Mais elle était encore plus sombre lorsque Mgr Žanić annonçait son jugement négatif à différentes étapes que je n’ai pu détailler. Chaque fois, le pire a été évité contre toute attente. La grâce de Medjugorje continue : jusqu’ici la Vierge Marie s’est montrée discrètement la plus forte, jusque dans le pire, qui abonda.

Sur une action officielle reconnue officiellement abusive contre les Franciscains

Un fait trop peu connu confortera ceux qui apprécient les grâces de Medjugorje. C’est que les répressions de l’autorité ecclésiastique contre les franciscains, dont la paroisse de Medjugorje a subi artificiellement les contre coups et interférences, ont été parfois abusifs. Et l’un de ces abus a été officiellement reconnu et cassé par la Cour suprême de l’Église (analogue à nos Cours de Cassation) : La Signature Apostolique le 24 mai 1991 (R. Laurentin, Dernières Nouvelles 13, p.37.50) :

En bref, deux franciscains avaient été condamnés par décision administrative, pour avoir continué leur activité pastorale à Mostar, près de fidèles qui ne voulaient recevoir les sacrements que des franciscains. Ils avaient été exclus de l’ordre, relevés de leurs vœux et frappés de suspense (c’est à dire privés du droit de célébrer la messe et d’exercer les actes de leur sacerdoce). Ils allaient souvent prier à Medjugorje, et Vicka, par eux consultée, avait été jugée bien imprudente et fautive de dire, après avoir consulté la « Gospa », que le jugement avait été précipité.

Les deux frères récusaient la sanction administrative, demandaient à être jugés, selon les lois de l’Église, et promettaient de s’y soumettre. Leurs divers appels ne recevaient pas de réponse. Le dernier, adressé le 2 septembre 1985 à la Signature Apostolique fut pris en considération. Mais, au début de 1986, un des plus proches collaborateurs du Pape arrêta : le fonctionnement de la justice sur ce cas où il était impliqué, car les responsables de l’Ordre franciscain ayant pris la décision sur sa ferme demande, il se devait de les « couvrir ». Les juges de la Signature Apostolique soucieux de l’indépendance statutaire de la justice, si bien établie dans l’Église comme dans tous les états civilisés avaient été choqués de cette pression administrative.

De plus, peu après, le Pape (ignorant sans doute ce fait) avait nommé ce collaborateur, Préfet de la Signature Apostolique ce qui avait aggravé le malaise des juges. Trois ans après, le Pape sans doute mieux informé, transféra ce Cardinal à une autre Congrégation et les juges reprirent l’examen du dossier. Ils jugèrent, en toute honnêteté, que la déclaration administrative prise contre les frères était invalide et contraire au Droit Canonique, ce qui permit à l’un des frères, persécuté depuis 10 ans, mais fidèle, de reprendre ses fonctions. L’autre avait été si scandalisé par ce déni de justice, et si déboussolé par une dépression prolongée, qu’il avait abandonné la vie religieuse et le sacerdoce, conformément (hélas!) à la décision administrative qui l’excluait de son Ordre, en annulant officiellement ses trois vœux dont celui de chasteté. Le jugement de la Signature Apostolique qui casse cet abus de pouvoir a mis un terme à cette irrégularité dans le fonctionnement de la justice suprême. Il est signé par 10 juges, dont 5 Cardinaux, le doyen du Sacré Collège en tête, car la Cour Suprême de l’Église se situe à un niveau plus élevé que celles des états. Les juges y sont les principaux gouvernants : des chefs de Dicastères, l’équivalent des Ministres d’État.

Toutefois, par égard pour les hauts personnages impliqués dans cet abus de pouvoir, le tribunal suprême a publié ce jugement avec une annotation qui en interdit la publication : cela n’autorise pas à le reproduire avec ses justes attendus, mais seulement à en faire connaître les conclusions publiques.

Bref, si les apparitions de Medjugorje produisent indiscutablement de bons fruits de conversion et de sainteté que nous connaissons tous, l’opposition à Medjugorje produit de mauvais fruits. Chacun peut y référer le seul critère de discernement donné par le Christ : « On juge l’arbre à ses fruits... » (Mt 7,17-20 ; 12,33)

Prions donc la Gospa de continuer à protéger Medjugorje. Qu’Elle maintienne chez tous l’obéissance, le respect de l’évêque du lieu et des autorités, le sens de la paix, mais aussi la générosité et l’efficacité au service des lumières et fruits de Medjugorje : ce chef-d’œuvre de Notre-Dame en notre fin de siècle. Qu’Elle éclaire les hauts responsables de l’église, comme Elle a éclairé le Pape Jean-Paul II lui-même.

Bibliographie :

1. Paul M. Zulhener, Hermann Denz, Wie Europa lebt und glaubt, DÜsseldorf 1993 2.

2. Roman Bleistein, Die jungen Menschen und die alte Kirche, Freiburg 1972.

3. 4. Brigitte und Peter L. Berger, In Verteidigung der bürgerlichen Familie, Frankfurt 1984.

5. Paul M. Zulehner. Andréa Slama, …Österreichs Männer unterwegs zum neun Mann ? BKMUJF, Vienna 1994.

 

[1] Mysterium salutis, Band 111/2 Einsiedeln – Zürich – Köln, 1969

[2] Leksikon für Theologie und Kirche, 2e édition, Das Zweite Vatikanische Konzil, Teil 1, Freiburg-Basel-Wien, 1967 : Dr. Otto Semmelroth, Kommentar 8. Kapitels Lumen Gentium, p. 337.

[3] Lumen Gentium, N° 36

[4] Semmelroth, 337

[5] Müller, 16

[6] Lumen gentium, N° 53

[7] Cf. Karl Rahner, Maria Mutter des Herrn, Theologische Betrachtungen, Freiburg-Basel-Wien, 5e édition, 1965, p. 104-105

[8] Rahner, 58

[9] Rahner, 54

[10] Müller, 437

[11] Rahner, 54

[12] Semmelroth, 337

[13] Lumen gentium N° 62

[14] Rahner, 34

[15] Rahner, 37

[16] Müller, 417

[17] Cf. Müller, 416

[18] Cf. Müller, 416

[19] Müller, 416

[20] Rahner, 36

[21] Rahner, 67

[22] Rahner, 68

[23] Müller, 471

[24] Müller, 471

[25] Cf. Müller, 472-473

[26] Lumen gentium N° 65

[27] René Laurentin, La Vierge au Concile, 1965, Paris – Limburg, 1967, p. 175

[28] Müller, 451

[29] Müller, 486

[30] Müller, 463

[31] R. Laurentin, 18

[32] Lumen gentium, N° 56

[33] Lumen gentium, N° 56

[34] R. Laurentin, 171

[35] Cf. Jean Cantinat, CM, Marie dans la Bible, Lyon/Paris, 1963, p. 131

[36] Rahner, 40

[37] Rahner, 81

[38] Bossuet, Élévations sur les Mystères, éd. D. de Bouvier, 1933, p. 692

[39] J. Cantenat, 128

[40] Cf. Rahner, 91

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